
Roger-Luc Chayer
Photo: Dame Edna Everage par Greg Wood/AFP/Getty Images
Depuis quelques mois, l’actualité nous informe que dans plusieurs états américains principalement, on adopte de nouvelles lois interdisant tout spectacle de drag queens sous prétexte que cette forme d’expression nuirait au développement normal des enfants et à leur sécurité. Évidemment cela se passe dans des états réputés plus conservateurs. Mais qu’est-ce qui peut bien alimenter de telles opinions de politiciens qui, en plus, ne consultent même pas les populations qu’ils représentent, se contentant simplement d’exprimer leurs préjugés.
Tout d’abord, qu’est-ce qu’une drag queen? Contrairement à la transsexualité ou au travestisme, la drag queen est avant tout un artiste. Selon Wikipédia, « Une drag queen est une personne, généralement de sexe masculin, qui construit une identité féminine volontairement basée sur des archétypes de féminité et de rôles de genre de façon temporaire. Une drag queen fait souvent dans le cadre du spectacle vivant, incluant souvent du chant, de la danse ou du lip-sync. Elle se représente généra-lement lors d’événements comme les Marches des fiertés ou les concours de beauté, ou dans des endroits comme les cabarets ou les boîtes de nuit. » De par sa nature même, la drag queen est donc un artiste qui caricature certaines personnes et, souvent, ces artistes sont mêmes membres de l’Union des artistes.
Le travestissement est une pratique personnelle qui consiste à porter les vêtements et autres accessoires qui sont, dans une société donnée, généralement associés au genre opposé du sien dans le but de ressembler volontairement au genre opposé. Le travestissement peut impliquer d’adopter les comportements associés à un genre différent du nôtre. Quant à la transidentité, elle résulte d’une condition médicale nécessitant souvent l’utilisation de médicaments ou des chirurgies, rien à voir avec le spectacle!
Quand ces politiciens invoquent la sécurité des enfants, il faudrait leur demander combien d’enfants sont morts en voyant une drag queen vs combien sont été exposés à des tueries de masse aux États-Unis depuis 1999. Drags: 0, Violence et meurtres: 348,000 selon le Washington Post.
Prenons l’exemple de Dame Edna, personne très connue mondialement qui a présenté un spectacle pour la Reine Élisabeth et qui a animé les cérémonies de clôture des Olympiques de Melbourne. Barry Humphries, qui a maintenant 89 ans, est hétérosexuel, père de 4 enfants et joue son rôle d’humoriste depuis les années 50. Plus près de nous, au Québec, on a eu Jean Guilda, qui a animé pendant de nombreuses années, les nuits de Montréal. Il était surtout connu pour ses spectacles humoristiques, de cabaret où, vêtu de toilettes féminines extravagantes, il imitait parfaitement l’une ou l’autre des femmes-types de ce milieu — les Marlene Dietrich, Rita Hayworth, Mistinguett, Édith Piaf et autres Marilyn Monroe, Bette Davis, Lucille Ball… — jusque dans le maquillage, les gestes, la démarche, la parole et le chant.
Ces lois résultent clairement de préjugés et de la méconnaissance du sujet. Un premier juge fédéral a d’ailleurs suspendu la version du Tennessee début avril. L’humoriste australien Barry Humphries, qui incarnait Dame Edna Everage depuis plus de 50 ans, est malheureusement décédé le 22 avril dernier.