Roger-Luc Chayer
L’an dernier, à la fin de l’année, le gouvernement fédéral a voté et passé une modification importante au code criminel canadien visant à criminaliser dorénavant les médias et diffuseurs de publicités ou d’annonces de services sexuels.
Passées à une forte majorité en octobre dernier (156 pour, 124 contre), les nouvelles mesures criminalisent les clients et les proxénètes et interdisent la publicité imprimée ou en ligne pour la vente de services sexuels d’autres personnes. Cela signifie donc que les journaux, magazines, sites Internet et autres publications ne pourront plus diffuser de publicités de massages et d’escortes.
Or, depuis le vote des nouvelles mesures, la question qui se pose dans les médias et auprès des observateurs est : qui appliquera la loi pour forcer le retrait de ces publicités maintenant illégales? Tout d’abord dans le cadre de ce dossier, une vérification a été faite afin de savoir si de tels services étaient toujours offerts et si des diffuseurs enfreignaient éventuellement la loi. Les quatre principaux médias et sites Internet qui offraient des services sexuels moyennant rémunération, avant la loi, étaient Craigslist, Gay411, ManWorks et un guide gai montréalais connu. Dans le cas du guide et de Gay411, le volume était exceptionnellement important.
À ce jour, vérification faite, on offre toujours autant de services sexuels contre rémunération, chez les mêmes diffuseurs à la différence que, dans le guide, les titres ont été changés, les annonces quant à elles sont aussi explicites. Sur Gay411, lors de notre vérification, 90 annonces de masseurs étaient disponibles rien que pour la région de Montréal. Dans ce lot, une infime minorité ne propose aucun service sexuel, le reste étant très explicite. Gay Globe a demandé à un porte-parole des services policiers de Montréal quelle était la portée de ces nouvelles mesures et qui était responsable de les appliquer. Selon notre source, la section des moeurs des services policiers, la Sûreté du Québec et même la Gendarmerie royale peuvent porter des accusations criminelles contre un média, ou les responsables de sites Internet si le volume ou la durée de publication sont importants. Par exemple, si un policier voit que plusieurs mois après l’adoption de la loi les annonces continuent, des accusations pourraient être déposées, car il y aurait concurrence déloyale en interdisant aux autres médias la publication des mêmes annonces. Un lecteur ou un utilisateur qui serait choqué par la présence de prostitution dans son média pourrait aussi porter plainte à son service de police local. À suivre donc…