Le Devoir
Le projet de loi qui criminalise la publication d’offres de services sexuels, de massages, d’escortes et de services pour adultes est adopté depuis le 10 octobre!
Le doute n’est maintenant plus permis. Le ministre de la Justice, Peter MacKay, a confirmé que les propriétaires de journaux et de magazines qui diffuseront des publicités de services sexuels s’exposeront à des poursuites judiciaires en vertu de la nouvelle loi. Le milieu médiatique s’inquiète: «Je crois qu’ils ne devraient pas publier ces publicités. Elles rendent possible la prostitution. Elles accroissent la demande. Elles facilitent l’exploitation qui est, à notre avis, inhérente à la prostitution. Nous croyons qu’elles font partie des causes à la racine [de la prostitution]. Or, nous tentons d’éradiquer ces causes et cette demande», a expliqué M. MacKay en point de presse après sa comparution au Sénat. Le C-36 prévoit que « quiconque fait sciemment de la publicité pour offrir des services sexuels moyennant rétribution » est passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans. Il accorde cependant une immunité aux personnes annonçant leurs propres services sexuels. D’où le flou qui persistait depuis le dépôt du projet de loi : on en concluait que cet article visait uniquement les proxénètes annonçant les services de « leurs filles ». Le ministre précise que les entreprises médiatiques offrant un support à ces publicités sont aussi visées.
Le sénateur Jean-Guy Dagenais a posé la question en comité: « L’infraction proposée pour la publicité de services sexuels va-t-elle sanctionner les éditeurs de documents, donc ceux qui font paraître de petites annonces, et va-t-elle sanctionner les administrateurs de sites Web qui vont afficher de telles annonces?. Le ministre a été clair : «La réponse à la question est oui.» Quant à Facebook et les autres réseaux sociaux sur lesquels une personne pourrait annoncer ses services, le ministre s’est montré plus flou. «Ce sera déterminé par les tribunaux.»
Le milieu médiatique s’inquiète de cette disposition. C’est le cas de Journaux Canada, une association représentant plus de mille journaux, hebdomadaires et publications communautaires: «Pour nous, c’est un gros problème, car ce genre de publicités est important»,explique le président John Hinds. Toutes les publications n’accueillent pas des petites annonces à caractère sexuel, mais certaines publications urbaines y font une large place, comme, par exemple, Now à Toronto. «Déjà que c’est difficile pour les journaux avec les revenus publicitaires qui diminuent…», continue M. Hinds. Il déplore le fait que les journaux devront poser un jugement de valeur sur les annonces leur étant soumises. «C’est aux juges de faire cela, pas aux journaux.» Le projet de loi C-36, qui répond à une décision de la Cour suprême, rend la prostitution illégale pour la première fois au Canada.