Selon: Marie-Josée Roy / Huffington Post Québec
Longtemps, Richard Abel a tu son orientation sexuelle. Sur les
conseils de son gérant, qui soutenait que son public était principalement
constitué de personnes âgées pratiquantes et croyantes,
qui verraient d’un mauvais oeil son homosexualité, le pianiste a
gardé sa relation amoureuse secrète pendant bien des années, lui
qui a franchi le cap de la soixantaine il y a deux ans.
Ses collègues de l’industrie de la musique, les journalistes et ses
proches étaient au courant, mais l’homme n’étalait pas cette réalité
au grand jour en entrevue et évitait les sorties mondaines avec
l’élu de son coeur. Et tous ceux qui l’ont côtoyé ont respecté sa
volonté de discrétion.
Or, l’an dernier, Richard Abel lançait sa biographie, Mon histoire en
noir et blanc – Le clavier de ma vie. Et révéler la vérité, sa vérité, lui
apparaissait comme une incontournable évidence. Il devait aborder
le sujet de son identité sexuelle, comme il devait aussi traiter
de son enfance dans une extrême pauvreté, de la violence de son
père et de son gain à la loterie 6/49. Ça allait de soi. Et c’est avec
un immense bonheur que l’artiste a constaté que ses admirateurs
ne s’offusquaient absolument pas de ce qui pouvait se passer
dans son intimité. «Quand on écrit un livre, on n’a plus le choix,
siffle le principal intéressé en entrevue avec le HuffPost Québec.
On dit les vraies affaires, ou pas. J’ai décidé de tout raconter. Et je
n’ai reçu aucun message homophobe. Rien. Ni sur Facebook, ni ailleurs.
Maintenant, il m’arrive parfois, dans des spectacles, de présenter
mon copain, parce qu’il s’occupe de la table de marchandise
à vendre. Je n’aurais pas fait ça, avant, mais maintenant, je le fais.»
«Les gens aiment beaucoup qu’on s’ouvre un peu, poursuit le musicien.
J’ai eu beaucoup d’appui et j’aime bien ça. Maintenant, je
me permets d’aller au restaurant avec mon chum sans me sentir
regardé. Ça m’a un peu libéré. Danielle Ouimet m’avait dit que ç’allait
être presque une thérapie, et c’est vrai. Ça fait du bien. C’est
quelque chose que j’avais caché au public, que j’aurais aimé partager…
et je l’ai finalement partagé, et ce n’est pas si pire que ça.
Les gens m’ont dit qu’ils avaient préféré que j’ouvre mon coeur et
que je dise les vraies choses, au lieu de les bullshiter. Ce n’est pas
évident, d’aller à la télévision, à la radio, d’aller voir Paul Arcand,
Denis Lévesque, et de parler de sa vie privée, avec des centaines
de milliers de personnes qui nous écoutent…»
On comprend, en écoutant le volubile Richard Abel se raconter
avec toute l’authenticité du monde, que ce rapport franc avec les
gens contribue à sa passion pour son métier, toujours intacte après
presque 40 ans de carrière. Richard Abel, lui, a encore envie de
«faire la tendresse» à ceux et celles qui lui ont permis de vendre
plus d’un million de disques à travers les ans, de vivre des périodes
fastes de 50 000 et 60 000 albums écoulés. Certes, les temps ont
changé, mais l’excitation y est toujours.
«La musique actuelle est tellement différente de celle que je fais»,
philosophe-t-il. Dans Elegancia Autour du monde, Richard Abel
amalgamera deux univers chers à ses yeux : celui de la mégaproduction
Elegancia, que 7000 personnes avaient applaudie au
Centre Bell il y a 12 ans, et celui d’Autour du monde, son plus
récent spectacle, où il utilise le prétexte de visites dans différents
pays pour incarner des airs emblématiques.