SIDA

Tout le monde connaît le processus de pensée quand vient le
temps de raisonner sur le SIDA. Prévention = condoms, Qualité de
vie = revenus garantis et couverture médicamenteuse etc. Il existe
toutefois de nouvelles réalités qui ne sont plus expliquées par les
schémas du passé et qui demanderaient peut-être un nouveau ques-
tionnement collectif.
Prenons trois exemples de schémas qui devraient définitivement faire
lʼobjet de réflexions de la part des spécialistes en santé et des groupes
communautaires, question de permettre aussi aux gouvernements dʼavoir
de nouveaux points de repères plus précis, plus exactes.
Première réflexion: Le SIDA peut se transmettre si on ne se protège
pas. Le SIDA? Un seul SIDA? La recherche actuelle propose de nouvel-
les théories intéressantes pour expliquer ce quʼest devenu le VIH après
plus de 20 ans dʼexistence et de mutation. Dʼaprès les spécialistes, il
semblerait quʼil nʼexiste pas un seul véritable SIDA mais bien plusieurs
versions mutées du virus dʼorigine. Lors de lʼacquisition de lʼinfection,
un individu serait en réalité infecté par plusieurs formes de SIDA ce qui
compliquerait justement le traitement.
Est-ce quʼil serait temps dʼinclure dans le discours de prévention une
mise à jour de la réalité SIDA dans sa définition? Est-ce quʼil serait
temps de parler de multi-infection en une seule séroconversion dans les
campagnes publicitaires? Comme si on attrapait 2 ou 4 SIDA en même
temps? Pourquoi pas…
Deuxième réflexion: Le Point a participé à une émission radio très
populaire dans la région de Québec il y a un an, avec André Arthur, et
notre approche constitait, lorsque nous parlions de prévention du VIH
chez les jeunes, à non pas parler de la maladie et de ses inconvénients
mais plutôt à leur dire la réalité: On meurt du SIDA, mourrir ça fait
mal, cʼest douloureux physiquement de vivre avec le VIH-SIDA mais
en mourrir, cʼest encore plus douloureux, certains malades meurent en
criant… Je sais que cʼest très cru mais il serait intéressant de savoir si une
campagne de prévention utilisant de tels mots serait plus efficace?
Troisième réflexion: On a beaucoup parlé au fil des années des
conséquences économiques du SIDA mais souvent dans une perspective
tournée vers le patient. Tout le monde sait que la qualité de vie financière
dʼune personne infectée est diminuée proportionnellement à son degré
dʼatteinte etc. Jʼai le sentiment que le discours est vieillot et que les gens
ne lʼécoutent plus parce quʼil a été un peu trop utilisé. Est-ce quʼil serait
temps dʼintroduire le concept de participation fiscale pour les personnes
atteintes?
Je mʼexplique. Les personnes infectées, porteuses, atteintes coûtent
cher à lʼétat nous le savons, mais ce que nous ne disons jamais, cʼest
quʼune personne atteinte, en santé, qui est bien traitée médicalement,
sʼenrichit peut-être plus quʼon ne le pense et lʼÉtat avec elle. Elle devient
contributrice, paie ses taxes, ses impôts et globalement, la contribution
des personnes atteintes à lʼeffort fiscal peut certainement être quantifiée
par une recherche statistique qui viendrait mettre un nouvel argument
positif dans les stratégies budgétaires de lutte de la part de lʼétat.
Est-ce que la lutte au SIDA serait rentable? Est-ce quʼil serait vrai
maintenant quʼune personne atteinte, grâce à la thérapie et aux
médicaments, pourrait générer plus de revenus fiscaux que de dépenses et
ne serait plus vraiment une charge pour lʼÉtat?
Le raisonnement, supporté par une étude statistique à faire, pourrait
mettre en évidence de nouvelles approches en matière dʼaide aux
personnes atteintes puisquʼil serait rentable de les traiter gratuitement et
quand vient le temps de parler dʼargent, lʼÉtat est toujours le premier à le
faire et généralement à couper… Il existe ainsi toute une série de questions
qui, en 2005, pourraient permettre de mieux comprendre une maladie
toujours aussi virulente sinon plus quʼà ses débuts dans les années ʻ80
mais avec de nouveaux arguments scientifiques, économiques et sociaux
qui nous feraient réaliser que finalement, le SIDA nʼest peut-être pas une
fin en soi, mais le début dʼun processus qui pourrait être appelé, “voie de
guérison” dans le vrai sens du mot. Je serais très curieux de connaître les
résultats dʼétudes qui viendraient répondre à ces questions plutôt que de
toujours poser les éternelles mêmes questions: Savez-vous que le SIDA
est transmissible sans condom? Savez-vous comment mettre un condom?
Avez-vous quelquʼun dans votre entourage qui est séropositif? Vite que
lʼon pose de nouvelles questions, le sujet est déjà devenu inintéressant, et
ça, les sondages le prouvent.