Au Maroc, lʼhomosexualité est punie par la loi,
mais un consulat bénéficie de lʼextraterritorialité
Deux hommes marchent, la main dans la main, sous les applaudisse-
ments et les jets de pétales. Ils sʼavancent en direction dʼun consul qui
les déclarera dans quelques instants mari et…mari. Mais pourront-ils
sortir sans dommage du consulat? Cʼest bien dʼun mariage homosexuel
quʼon parle. La scène pourrait être anodine sous dʼautres cieux, où les
mariages gay sont de plus en plus admis par la société comme par les
pouvoirs publics. Elle lʼest beaucoup moins lorsquʼelle a lieu sur le sol
marocain et surtout si lʼon sait que lʼun des futurs «mariés» est marocain.
Il faut dʼabord signaler que la demande de mariage a été déposée auprès
du consulat dʼun pays étranger et non musulman. Ce qui veut dire que,
juridiquement, lʼéventuelle «cérémonie» nʼaura pas lieu sur le territoire
national. Mais techniquement, cʼest bien sur le sol de lʼÉtat marocain,
musulman, que deux hommes seront probablement unis par «les liens
sacrés du mariage».
Une question: Pourquoi parle-t-on dʼun mariage gay dans un pays
où lʼhomosexualité est réprimée par le code pénal? Au regard de la loi
et des conventions internationales, il est tout à fait possible pour un
consul de marier deux personnes selon les lois de son pays. Dans ce cas
dʼespèce, il se trouve que le pays du Consulat admet les mariages gay.
A priori, aucun problème ne se pose. Sauf peut-être celui des relations
diplomatiques et du «respect des susceptibilités» dʼun peuple musulman
pour lequel une telle scène représente une profonde offense. En face, le
consul qui a reçu la demande pour lʼunion des deux hommes se trouve
également dans une situation peu enviable. Il doit à la fois sʼassurer de ne
pas heurter la susceptibilité des Marocains et faire face aux pressions des
lobbies gay qui ont poussé son gouvernement à adopter une loi légalisant
les mariages homosexuels.
Cet imbroglio juridique ressemble beaucoup à celui que pourrait rencon-
trer un Marocain musulman résidant dans un pays dont les lois interdisent
la polygamie. Imaginons ce dernier se présentant au Consulat du Maroc le
plus proche et demandant dʼêtre marié à deux, trois, voire quatre femmes.
Il semble peu probable que le consul accepte de lui accorder ce droit, qui
est pourtant légitime selon le statut personnel marocain. Et même si ce
Marocain polygame se marie avec plus dʼune femme au Consulat, il ne
pourra jamais vivre sa polygamie dans le pays hôte.
Les deux gay qui souhaitent se marier vivaient «paisiblement» en con-
cubinage dans le pays du ressortissant étranger. Un beau jour, la police
dʼimmigration débarque au domicile des deux «tourtereaux» et découvre
que le conjoint marocain est un immigré clandestin. Autrement dit, il
était sans papier. Il est alors expulsé. Une décision qui aurait dû briser
«le ménage» à jamais puisquʼils ne devaient plus se retrouver. Mais
cʼétait sans compter «la force de lʼamour», puisque le ressortissant étran-
ger décide de suivre son compagnon au Maroc et de faire le nécessaire
pour lʼaider à regagner le pays où ils vivaient. Le couple a alors pensé
au regroupement familial à travers le mariage. Ils seront dʼautant plus
confortés dans leur décision que le gouvernement du pays du ressortissant
étranger approuve le mariage entre deux personnes du même sexe.