Université de Montréal
Des 40 millions de personnes infectées par le VIH dans le monde, un peu moins de un pour cent ont un système immunitaire fort leur permettant de résister plus longtemps que les autres au virus. On les nomme «contrôleurs élites». Une équipe de recherche sur le VIH du Laboratoire d’immunité antivirale de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), travaillant en collaboration avec celle du Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CRCHUM), a découvert un mécanisme par lequel le système immunitaire des contrôleurs élites parvient à combattre le VIH-1: des mutations génétiques affectant la structure qui entoure le génome du VIH (la capside) permettent à une protéine humaine, TRIM5alpha, d’activer le système immunitaire des contrôleurs élites.
«Chez la plupart des individus infectés, la force d’activation de TRIM5a est si faible qu’il n’y a pas d’effet sur le virus. Toutefois, il semblerait, chez les contrôleurs élites, que TRIM5a soit impliquée dans l’inhibition naturelle du VIH-1», explique Natacha Mérindol, chercheuse au Laboratoire d’immunité antivirale de l’UQTR et première auteure de l’étude. Il n’existe ni vaccin ni traitement curatif pour le VIH-1. Pour ces raisons, «il est important de comprendre pourquoi le virus est naturellement inhibé chez les contrôleurs élites».
Représentant moins de un pour cent des personnes infectées par le VIH-1, les contrôleurs élites sont tout de même aux prises avec le virus, mais l’infection est beaucoup plus faible que chez la très grande majorité des patients infectés. «Le système immunitaire des contrôleurs élites est capable de contrôler l’infection comme s’ils étaient traités même lorsqu’ils ne le sont pas», constate Natacha Mérindol.
«Nos patients infectés par le VIH ont été d’une aide fort précieuse tout au long de ces travaux de recherche. Nous les remercions sincèrement de leur grande générosité et de leur disponibilité. Cette étude est importante et pourrait permettre de faire avancer la recherche sur les vaccins contre le VIH», souligne la Dre Cécile Tremblay, qui est aussi microbiologiste et infectiologue au CHUM.
Des études avaient montré que la protéine TRIM5a contribuerait à nous protéger contre le VIH-1. L’équipe de chercheurs a donc analysé le virus trouvé chez plusieurs de ces contrôleurs élites, recrutés grâce à la Cohorte canadienne des progresseurs lents VIH gérée par le FRQS-SIDA/MI. Il s’agissait de comparer les échantillons sanguins de patients non traités par des agents antirétroviraux chez deux cohortes: contrôleurs élites et progresseurs normaux. «Notre objectif était d’aller chercher plus précisément une partie du virus qui nous intéresse: la capside, c’est-à-dire le “manteau du virus”, qui détermine la sensibilité à TRIM5a », dit Lionel Berthoux, qui a dirigé cette étude. La capside subit donc une forte pression du système immunitaire, ce qui favorise les mutations du virus et celui-ci devrait se multiplier plus facilement.
Ce mécanisme pourrait être mis à contribution dans la mise au point de stratégies immunitaires d’inhibition du VIH-1. Dans la lignée des travaux menés par le professeur Berthoux, une potentielle stratégie thérapeutique consisterait à opérer des modifications génétiques sur TRIM5a en vue d’augmenter sa force d’activation contre le VIH. Comme la force d’activation de TRIM5a est trop faible chez les individus normaux, il s’agirait de modifier TRIM5a pour la renforcer, ce qui aurait comme effet de diminuer la propagation virale.