
Par: Roger-Luc Chayer
Photo: Jennifer Maccarone – Défilé de Fierté Montréal
Réaliser des entrevues avec des personnes extrêmement compétentes, qui connaissent en profondeur les enjeux propres à nos communautés LGBTQ+, est l’un des plaisirs jalousement gardés de l’auteur de ce texte. En plus d’être présidente de séance à l’Assemblée nationale, Jennifer Maccarone est députée de Westmount–Saint‑Louis depuis 2018 et porte-parole de l’opposition dans plusieurs dossiers. Elle est surtout reconnue comme porte-parole de l’opposition officielle pour la communauté 2SLGBTQIA+, une sorte d’ambassadrice, un rôle qu’elle occupe depuis le 27 octobre 2022.
Dans un contexte politique international particulièrement tendu, j’ai demandé à Jennifer de nous parler de ce que représente, pour elle, la fierté.
« Pour moi, la fierté, ce serait d’avoir contribué à ce que le gouvernement adopte une approche systématique, avec une véritable réflexion pour les communautés LGBT dans tous les ministères. Comme députée à l’Assemblée nationale, je voudrais qu’on parle de plus en plus des enjeux LGBT. Par exemple, quand je m’adresse au ministre de la Santé, à la ministre responsable des Aînés ou à n’importe quel ministre, qu’on aborde tout de suite ces questions dans le contexte propre à chaque ministère — qu’il s’agisse d’inclusion, d’éducation ou de diversité. On ne doit pas oublier qu’il y a des personnes LGBT parmi les aînés ou dans toutes les sphères de la société. Il faudrait constamment réfléchir à leur réalité. Alors oui, si je pouvais contribuer à cette prise de conscience gouvernementale, ça serait exactement ça, ma fierté », m’explique Jennifer, qui s’implique dans de nombreuses interventions pour soutenir nos communautés — non seulement auprès du gouvernement, mais aussi en invitant les autres partis à faire de même.
Évidemment on ne peut parler de fierté sans parler de l’homophobie grandissante dans la société. Pourquoi est-ce que la fierté LGBTQ+ suscite tant de haine en 2025?
« Honnêtement, moi, je pense que c’est avant tout une question de dialogue — et c’est quelque chose de très difficile aujourd’hui, n’est-ce pas ? Il y a un manque évident de compréhension. Regardez ce qui s’est passé avec les drag queens…
Le simple fait de pouvoir s’asseoir, discuter et trouver des terrains d’entente, ce serait déjà une forme de fierté, à la québécoise. Peu importe qui nous sommes dans la société, on devrait être fiers de ce que nous sommes collectivement, comme population. Trouver une solution à l’homophobie provoquée en réaction à notre fierté LGBT devrait passer par un véritable leadership de la part des figures clés de notre société, comme le premier ministre et les ministres du gouvernement — ce que nous n’avons pas actuellement. Trop souvent, la population adopte les mêmes réflexes ou le même raisonnement que son gouvernement. Or, ce gouvernement a peur d’agir. Il soutient publiquement des groupes comme PDF Québec, connus pour leurs positions transphobes. C’est un gouvernement qui évite de parler des enjeux LGBT, je l’ai répété à plusieurs reprises. Les actions — ou l’inaction — du gouvernement alimentent la haine d’une partie de la population à notre égard. Le leadership politique trace la voie à suivre, et malheureusement, ce n’est pas celle qui est la meilleure pour nos communautés. »
D’où la nécessité d’élections ! Merci, Jennifer, pour ces propos qui nous aident à mieux comprendre les enjeux.