FINI, LE COMPLEXE BOURBON!

Roger-Luc Chayer

C’est donc à la fin du mois de février dernier que des ouvriers entreprenaient la démolition d’un des immeubles les plus connus du Village gai de Montréal, une icône pour certains, un monument pour les autres. Il était plus que temps, car à l’abandon depuis quelques années, le Complexe Bourbon était devenu une triste plaie qui nuisait à l’image de Montréal tant pour les résidants locaux que pour les touristes qui profitent de la piétonnisation de la rue Ste-Catherine Est. Autrefois porte-étendard de l’image du Village gai dans le monde, le Complexe Bourbon a servi à unifier les communautés LGBT autour d’une sorte de bateau de croisière comportant une foule de services et d’établissements. On venait de partout pour y passer des week-ends ou des vacances.

Tout d’abord, il y avait le fameux Club Sandwich, côté Ouest du complexe, qui offrait les plus imposantes portions au pays avec frites à volonté, sans parler de l’accès à de très grandes terrasses qui faisaient des après-midis d’été des moments inoubliables de détente et de plaisirs. Juste à côté, on pouvait manger dans un véritable wagon de train, sur de longues banquettes, le tout décoré de magnifiques boiseries dans une ambiance relaxante et privée.

En allant vers l’Ouest, on croisait l’entrée de l’hôtel Bourbon qui offrait une cinquantaine de chambres modernes et bien décorées, sur deux étages, avec un concept de terrasses privées pour plusieurs chambres. Du côté Est se terminait un plus petit local servant parfois de bar, parfois de glacier, selon les époques. Au coin des rues Champlain et Ste-Catherine était aménagé un terrain sablonneux servant de plage et souvent de terrain de volley-ball. Tout eh haut, sur le toit du Club Sandwich, il y avait même une chapelle

servant à célébrer les premières unions civiles et les mariages gais, avec les services du célèbre pasteur Réal Murray, maintenant décédé. Dans le sous-sol, il y avait deux immenses bars. La situation du complexe était idéale. En avant, il y avait la rue Ste-Catherine Est avec sa forte affluence de jour comme de nuit et derrière, une ruelle servant d’immense terrasse avec des dizaines de tables avec vue sur le parc Champlain et sa généreuse verdure.

Malheureusement, à la suite de la location des restos et de l’hôtel à des entrepreneurs peu scrupuleux n’ayant pas les moyens de faire fonctionner de façon rentable ces immenses installations, le complexe, pensé et construit à partir de souvenirs de voyages à Las Vegas de son premier propriétaire, Normand Chamberland, est lentement tombé en ruines, fermant partiellement certains locaux pour finir squatté puis barricadé depuis 2016. Comme le bâtiment n’avait pas été construit à la base en respectant toutes les normes municipales et gouvernementales, et comme certains matériaux n’étaient pas conformes à la législation, il aurait été difficile, voire impossible de sauver ce qui était connu comme un monument unique au monde.

Propriété d’une société semi-gouvernementale du Qatar, le complexe a été démoli le mois dernier pour faire place à un nouveau bâtiment de plusieurs étages qui comportera de nombreuses unités de condos et plusieurs étages de commerces. Une bonne nouvelle, somme toute, qui permettra certainement à ce coin du Village de revivre et qui amènera au quartier une nouvelle clientèle fort nécessaire à la survie de nombreux commerces, mais surtout pour redynamiser un arrondissement qui en a bien besoin!

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