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Une jeune femme de 20 ans a été interpellée, mercredi matin à Saint-André, pour des menaces de mort contre deux associations réunionnaises qui défendent les droits des homosexuels. En se faisant passer pour un terroriste islamiste, la suspecte, qui fréquente une église pentecôtiste, voulait effrayer ses victimes.
Une page Facebook baptisée « Mort à Trans Infos Réunion » pour dénoncer la journée internationale contre l’homophobie et la transphobie, le 17 mai dernier. Et, parce que cela ne suffisait pas, des mails de menace de mort directement adressés à deux associations, dont OriZon qui milite pour la reconnaissance des droits des LGBT et contre les discriminations liées à la transidentité.
Le message internet fait froid dans le dos. Intitulé « Mort à vous on va vous décapiter ! Mort aux homosexuels, travestie et transsexuel ! », il utilise la rhétorique des terroristes islamistes. L’auteur anonyme parle des deux associations en terme de « cible » et promet de « venir avec des AK 47 » pour viser « tous les gens qui se trouvent chez vous ». « Comme avec Charlie Hebdo et au Bataclan, nous ferons également un massacre avec toutes les associations impliquées dans l’apologie des kâfirs !!! », prévient aussi le message.
Enfin, pour bien convaincre ses victimes qu’il appartient à la mouvance islamique, l’auteur du message fait référence à « Nail Varatchia », le Dionysien mis en détention provisoire en juin 2015 pour avoir monté à la Réunion un réseau de recrutement de candidat au djihad pour la Syrie. « On vengera notre frère Nail Varatchia que vous avez enfermé dans les cellules françaises ! ».
Devant la teneur de ces messages, les responsables des deux associations ont décidé de déposer plainte. « Pas de question de laisser passer de telles menaces, affirme Stéphane Ducamp responsable de l’association OriZon. Il faut arrêter de se cacher et ne pas accepter d’être la cible de ces attaques contre les homosexuels et les transidentitaires. Nous sommes souvent l’objet de menace mais pas de ce niveau et de cette gravité-là ».
Dans ce climat délétère de menace d’attentats, ces messages ont été pris très au sérieux par les autorités judiciaires. La direction départementale de la Sécurité intérieure (DDSI), compétente en matière de lutte antiterroriste, a été immédiatement informée. Une enquête a été ouverte et menée par la brigade criminelle de la sûreté départementale.
Les policiers ont rapidement découvert que le message avait été envoyé avec une adresse e-mail temporaire, une « guerrilla mail » utilisée par ceux qui ne veulent pas qu’on retrouve leur véritable adresse et qui reste valide une heure. Selon nos informations, les enquêteurs ont découvert que le message était vraisemblablement parti du Panama. Impossible, donc, à remonter plus en amont.
Repérée par les policiers sur Facebook
Pour des raisons de sécurité et ne connaissant pas le degré de risque d’attaque, la préfecture a demandé aux deux associations d’annuler leurs deux manifestations prévues fin mai, dont le festival « Arèt’ ek sa ».
D’après une source judiciaire, les policiers ont récemment retrouvé l’adresse IP utilisé pour poster des messages sur la page Facebook anti-journée mondiale de lutte contre l’homophobie.
Tôt mercredi matin, les policiers de la SD et du groupe d’intervention de la police nationale (GIPN) ont fait irruption dans une maison de Saint-André pour interpeller les propriétaires et mener des perquisitions.
Principale suspecte, la jeune femme de 20 ans résidant chez ses parents a été placée en garde à vue et a reconnu avoir écrit ses messages. Fréquentant régulièrement l’église Mission Salut et Guérison, elle a indiqué que, selon elle, les personnes homosexuelles et transgenres étaient « des suppôts de Satan ». « Car la Bible ne parle ni de l’homosexualité ni des personnes transsexuelles ». L’enquête fait paraître que cette jeune femme sans emploi reste isolée et passe ses journées sur son ordinateur. « Elle présente des signes de désocialisation », confie une source judiciaire.
Déférée hier au parquet de Saint-Denis, la jeune femme est ressortie du palais de justice avec une convocation pour « menaces de mort matérialisée par des écrits à raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité sexuelle vraie ou supposée ». Elle comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Saint-Denis début juillet.
Jérôme Talpin