Le Figaro
Cette maladie est presque trois fois plus fréquente chez les personnes atteintes notamment de schizophrénie ou de troubles bipolaires.
La toxoplasmose joue-t-elle un rôle dans l’apparition de certaines maladies psychiatriques? L’hypothèse, si incongrue qu’elle puisse paraître, fascine les scientifiques depuis une dizaine d’années.
Elle vient d’être relancée par deux études présentées en jui. Toxoplasma gondii, parasite hébergé par le chat, est redouté des femmes enceintes en raison des risques qu’il fait peser sur le foetus et par les personnes immunodéprimées. Il a longtemps été réputé inoffensif chez les enfants et les adultes en bonne santé. Mais les médecins le soupçonnent désormais d’avoir des effets insidieux sur le cerveau. Les recherches conduites par le Dr Guillaume Fond, affilié à la Fondation FondaMental, confirment l’existence d’un lien statistique troublant entre la toxoplasmose et certaines maladies mentales.
Le psychiatre a analysé une cinquantaine d’études menées depuis cinquante ans et montre que la toxoplasmose est bien plus fréquente chez les personnes atteintes de schizophrénie et de maladies bipolaires que dans la population générale. Quelques travaux esquissent aussi une association avec les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) et les addictions. «On pourrait imaginer que ces maladies psychiatriques favorisent l’exposition au parasite, souligne l’auteur, mais l’étude montre que la contamination par Toxoplasma gondii précède le déclenchement des troubles. Cela nous invite à penser que la toxoplasmose est un facteur de risque de schizophrénie.»
Près de la moitié de la population française est porteuse de ce parasite, qui se transmet principalement par l’ingestion de fromage non pasteurisé, de crudités et de viande mal cuite. «Dans l’immense majorité des cas, le système immunitaire neutralise le parasite, qui se met en sommeil et s’enkyste dans le cerveau et dans les muscles», décrit Mohamed-Ali Hakimi, directeur de recherches à l’Inserm. Ce phénomène provoquerait une inflammation cérébrale chronique susceptible de favoriser, chez certains sujets prédisposés, l’apparition d’une schizophrénie. L’hypothèse, intellectuellement séduisante, demande cependant à être confirmée: «Nous avons observé que la constitution de ces kystes entraîne chez la souris un effet sur le comportement. Mais les recherches sur l’homme se limitent à relever une corrélation.» S’il se confirme un jour, le scénario offrira l’espoir de traitements plus ciblés.