Sida : contrôler le VIH après la trithérapie, la dernière piste de la recherche

Nouvelobs

Après l’annonce retentissante de la « guérison » d’une petite fille contaminée par le VIH, une étude met en avant le cas de 14 patients adultes contrôlant leur charge virale plus de 7 ans après l’arrêt de leur trithérapie. Ces « rémissions fonctionnelles » sont-elles l’apogée de la recherche sur le sida ? L’objectif est-il toujours l’éradication du virus ? Réponse du professeur Lelièvre, médecin et chercheur en immunologie.

La recherche actuelle sur le sida a toujours pour objectif final le « HIV cure », c’est-à-dire l’éradication totale du virus, comme pour le fameux « patient de Berlin ». Mais, en attendant cette disparition totale, le but en termes virologiques est d’atteindre la rémission fonctionnelle, lorsque la réplication du virus est contrôlée par l’organisme sans traitement antirétroviral.

 

Réponse immunitaire pertinente


Aujourd’hui, les traitements permettent de contrôler la maladie mais, pour la majorité des patients, dès qu’on les arrête (en tout cas quelques semaines plus tard), la maladie repart. Et l’on revient au point où l’on en était avant la trithérapie. L’objectif est d’éviter ce rebond du virus en ayant suffisamment stimulé le système immunitaire pour lui permettre de contrôler la réplication virale.

 

Pour cela, on s’appuie sur des modèles, notamment les « elite controllers » (0,5 à 1% des patients), des gens qui ont été infectés mais dont le système immunitaire contrôle spontanément, c’est-à-dire en l’absence de tout traitement, la charge virale. Et, plus récemment, les chercheurs se sont penchés sur les patients traités lors de la phase de primo-infection et qui, lors de l’arrêt de la trithérapie, contrôlent spontanément le virus (jusqu’à 10% des patients traités pendant la primo-infection).

 

Avant, on se concentrait sur les traitements antirétroviraux. Maintenant qu’ils sont efficaces et que le principal axe d’amélioration est de trouver une molécule qui se prendrait une fois tous les mois plutôt que plusieurs fois par jour, la recherche se concentre de nouveau sur la problématique d’un vaccin (prophylactique mais aussi thérapeutique) ainsi que de la cure fonctionnelle.

 

L’idée est donc de mimer la façon dont les organismes de ces « elite controllers » et des patients en rémission fonctionnelle après avoir été traités lors de la primo-infection réagissent au VIH. En plus d’étudier le virus, on essaie de comprendre quelles sont les réponses immunitaires les plus pertinentes en listant tous les gènes impliqués et les protéines synthétisées pour contrôler la réplication du virus.

 

Étude ADN des « elite controllers »


Qu’ont alors de particulier ces « elite controllers » ? De quoi pourrait-on s’inspirer chez eux pour contrôler la charge virale des 99% des patients infectés et les « guérir »? Lorsque l’on observe leur ADN avec les informations de la cohorte de l’ANRS CO18, on constate une surreprésentation de certains gènes. C’est le cas notamment des molécules du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH), qui détermine les réponses immunitaires de l’organisme face aux pathogènes.

 

Les études actuelles tendent également à effectuer une étude transcriptomique (étude de l’ARN). Celle-ci permet, grâce à une technologie poussée, d’étudier l’expression de plusieurs milliers de gènes en parallèle et de les corréler à la réplication du virus chez un patient. Cette technique, qui a permis de déterminer récemment quels étaient les gènes impliqués dans la protection contre la fièvre jaune après vaccination, pourrait permettre de savoir demain quels sont les gènes impliqués dans la réponse efficace contre le VIH.

 

En parallèle, on tente d’étudier les personnes exposées non infectées, qui ont été en contact avec le VIH à un moment donné et dont le corps a été capable de s’en débarrasser. Mais on bute sur la façon de repérer ces populations et de prouver qu’elles ont bien été en contact avec le virus.

 

En attendant, la recherche se focalise sur les « elite controllers » et les patients en « rémission fonctionnelle » pour déterminer ce qui permet de contrôler le virus et ainsi savoir quelles sont les réponses à stimuler pour un vaccin prophylactique et surtout pour un vaccin thérapeutique, destiné aux personnes déjà infectées. Le but est que les personnes séropositives puissent ainsi arrêter leur traitement antirétroviral sans rebond de la charge virale.

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