
Charles Roncier
Les résultats de l’étude DOXYPEP confirment l’intérêt de la prise de doxycycline après un rapport sexuel (PEP pour post-exposition) pour faire baisser le risque d’infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes.
Annie Luetkemeyer, du Zuckerberg San Francisco General Hospital, UCSF, a présenté ces résultats encourageants lors de la Conférence internationale 2022 de Montréal sur le VIH/sida. L’essai DOXYPEP étudiait l’intérêt de la prise d’antibiotiques en post-exposition contre les infections sexuellement transmissibles. Les résultats des examens trimestriels de DOXYPEP montrent eux une réduction d’environ deux tiers du risque de contracter une IST bactérienne. La plupart des IST détectées étaient asymptomatiques.
L’essai DOXYPEP évaluait l’intérêt de la prise de 200 mg de l’antibiotique doxycycline dans les 72 heures qui suivent une relation sexuelle sans préservatif (pas plus d’une prise toutes les 24 heures). L’étude était ouverte aux hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes et aux femmes trans. Ces personnes sont particulièrement exposées face aux IST et devaient avoir connu un épisode d’infection sexuellement transmissible au cours de la dernière année pour rejoindre les cohortes.
Ces résultats très positifs ont poussé les chercheurs à interrompre l’essai un an avant la fin prévue: face à la différence d’efficacité significative entre les deux bras, le comité de surveillance a recommandé en mai 2022 de cesser le recrutement de nouvelles personnes. Toutes les personnes participant à l’étude ont eu accès à la doxycycline.
Dans le bras de randomisation des personnes séronégatives, l’efficacité était de 66%, avec 65 infections dans le bras témoin et 47 dans le bras doxycycline, qui comportait deux fois plus de personnes, soit une incidence trimestrielle de 29,5% dans le bras contrôle et de 9,6% dans le bras doxycycline. Parmi les participants séropositifs, l’efficacité était un peu plus faible, avec 62% d’efficacité.
Trente IST ont été dénombrées dans le bras contrôle, et 31 dans le bras sous doxycycline, soit des taux d’incidence trimestrielle de respectivement 27,8% dans le bras contrôle et 11,7%. C’est contre les chlamydias que l’efficacité était la plus élevée, avec 79% chez les personnes séronégatives et 70% chez les personnes vivant avec le VIH. Contre les gonorrhées, elle était de 59% chez les personnes sans VIH et 57% chez les personnes séropositives.
Dans le cadre de cet essai, la doxycycline en post-exposition s’est montrée sûre et tolérable (1,5% seulement des participants ont arrêté à cause d’effets indésirables), et l’observance a été élevée (87% des actes sexuels ont été couverts par la prise de doxycycline)
Annie Luetkemeyer a toutefois souligné le besoin majeur de données complémentaires de bactériologie, qui manquent à ce type d’études, quant aux risques de résistance (y compris S. aureus, Neisseria commensale, et plus généralement sur le microbiome intestinal). L’évaluation de l’impact sur le comportement sexuel est également en cours, et la sous-étude DoxyVac de l’étude ANRS Prevenir devrait également apporter des données complémentaires, particulièrement sur les gonococcies.