Incivilités au Village: Est-ce que le retour d’une brigade citoyenne sera nécessaire?

Image d'un brigadier

Roger-Luc Chayer (Image: IA – Gay Globe)

On en parle tous les jours dans les médias, qu’ils soient locaux ou nationaux, et la situation ne s’améliore pas dans le Village gai de Montréal. Les agressions physiques et sexuelles, les vols, les cambriolages, le vandalisme des voitures, le trafic de drogues, la prostitution, l’intimidation, les crimes haineux et la violence armée en général persistent.

Malgré les récriminations et les supplications des résidents, des commerçants et des usagers, la Ville rechigne à faire appliquer les lois et règlements, ce qui a pour résultat un laisser-aller complet qui nuit à la cohabitation et aux activités économiques de ce quartier, pourtant très agréable à visiter à une autre époque.

Le sentiment général parmi la population est que les policiers n’en font pas assez pour endiguer le flot des actes criminels. Plutôt que de réprimer ces actes en appliquant le règlement municipal et le Code criminel, on semble vouloir tempérer la frustration des commerçants et des résidents plutôt que d’affronter la source réelle du problème. Jusqu’ici, non seulement la situation sociale ne s’améliore pas dans Ville-Marie, mais selon certains policiers rencontrés récemment lors d’une petite opération policière exceptionnelle, le pire est à venir à l’automne.

Plusieurs se demandent s’il ne serait pas temps de faire revivre la Brigade du Village, créée dans les années 90 grâce à une concertation commerciale indépendante de la Ville. La Brigade avait également vu le jour à la suite de la révolte des résidents de la rue Champlain.

La révolte de la rue Champlain des années ’90

Pendant longtemps, la rue Champlain, entre Sherbrooke et de Maisonneuve, dans le Village, était devenue le principal lieu de prostitution à Montréal, avec des dizaines de prostituées présentes sur toute la rue, 24 heures sur 24. Évidemment, les résidents, contraints de circuler sur ce tronçon, étaient accablés non seulement par leur présence, mais aussi par la sollicitation incessante. De plus, les enfants, qu’ils devaient se rendre à l’école ou simplement jouer dans leur rue, étaient exposés à cette réalité jusqu’à ce que les résidents, excédés par la situation, décident d’agir. Cette situation engendrait une circulation anormale, la présence de surveillants et autres proxénètes, sans parler des seringues et des condoms usagés qui jonchaient les trottoirs!

Exaspérés par l’inaction de la Ville, des résidents ont donné un ultimatum aux autorités et aux prostituées: si elles ne partaient pas, ils s’organiseraient en groupes pour vider les lieux, par la force s’il le fallait. Certains résidents patrouillaient en groupes, armés de battes de baseball ou de casseroles, non pas pour agresser qui que ce soit, mais pour faire du bruit, effrayer les clients qui circulaient en voiture, et rendre la vie difficile aux prostituées. Ces dernières ne pouvaient plus compter sur le calme des lieux pour solliciter leurs clients, car ces derniers, craignant d’être reconnus ou arrêtés, préféraient éviter la zone. Et ça a marché!

Le retour de la Brigade du Village

La Brigade du Village est née peu de temps après, avec l’intention de procurer une présence rassurante pour les commerçants, les résidents et ceux qui fréquentaient le Village gai, à une époque où les agressions homophobes étaient plus fréquentes. La criminalité observée aujourd’hui n’était alors ni aussi présente ni aussi intense.

La Brigade était constituée de bénévoles, tous habillés de manière reconnaissable et visible, qui patrouillaient la rue Sainte-Catherine en saluant directement les commerçants et en procurant un sentiment de sécurité pour tous.

La Brigade ne relevait ni de la Ville, ni de l’arrondissement, ni du service de police. C’était une entité indépendante qui, en cas de problème, pouvait contacter directement les policiers ou les ambulanciers et restait sur les lieux jusqu’à ce que les autorités compétentes prennent le relais.

Le principe a relativement bien fonctionné, et le financement se faisait directement via les dons des commerçants pour l’achat des vêtements identifiés, des chaussures et du matériel de communication.

Malheureusement, en raison d’une gestion improvisée et de détournements de fonds—le Magazine RG avait d’ailleurs publié une série de reportages sur l’utilisation des fonds par le responsable de la Brigade—le groupe a été contraint de se dissoudre.

Une nouvelle Brigade pour 2024?

Étant donné l’état actuel de la situation en 2024, est-ce que le retour d’une Brigade du Village, composée de bénévoles ayant reçu quelques heures de formation en sécurité, serait une bonne initiative pour soutenir le travail des policiers et des cadets? Cette brigade pourrait offrir des yeux supplémentaires dans les rues, permettant ainsi aux autorités d’agir avec plus d’efficacité.

Des bénévoles, même avec une formation sommaire, seraient-ils prêts à essayer d’améliorer la situation dans le Village? Il faut toutefois reconnaître que la Ville ne participera probablement jamais à une telle initiative, car cela va à l’encontre de sa politique de cohabitation avec les déchets, les condoms, les seringues et les excréments humains qui jonchent les rues. La question se pose.

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