La prostitution est-elle légale au Canada ?

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Carle Jasmin (Image: Gay Globe)

La prostitution au Canada occupe un statut juridique complexe. L’acte de vendre des services sexuels n’est pas illégal ; cependant, de nombreuses activités connexes sont criminalisées en vertu de la Loi sur la protection des collectivités et des personnes exploitées (PCEPA) promulguée en 2014. Cette législation a marqué un changement significatif dans l’approche du Canada en matière de prostitution, visant à protéger les personnes impliquées dans le commerce du sexe et à réduire la demande de prostitution en criminalisant l’achat de services sexuels.

Historiquement, la position juridique du Canada sur la prostitution a fluctué. Avant la PCEPA, les lois se concentraient sur les activités entourant la prostitution plutôt que sur l’acte lui-même. Le Code criminel contenait des dispositions contre la sollicitation publique, l’exploitation de bordels et le fait de vivre des produits de la prostitution, ce qui rendait difficile pour les travailleurs du sexe de fonctionner dans le cadre de la loi. L’arrêt historique de 2013 de la Cour suprême, Canada (Procureur général) c. Bedford, a jugé plusieurs de ces dispositions inconstitutionnelles, car elles contribuaient au danger auquel étaient confrontés les travailleurs du sexe. Cette décision a nécessité une réforme législative, conduisant à la promulgation de la PCEPA.

La PCEPA a introduit plusieurs dispositions clés :

Criminalisation de l’achat de services sexuels : La PCEPA rend illégal l’achat de services sexuels ou la communication en tout lieu à cette fin. Cela déplace le fardeau juridique des travailleurs du sexe vers leurs clients, visant à réduire la demande.

Protection des communautés et des personnes exploitées : La loi criminalise la publicité des services sexuels, la réception d’avantages financiers provenant de la prostitution de quelqu’un d’autre et le recrutement de personnes pour la prostitution. Ces mesures visent à cibler ceux qui exploitent les travailleurs du sexe.

Immunité pour les travailleurs du sexe : Bien que la vente de services sexuels ne soit pas criminalisée, les travailleurs du sexe bénéficient d’une immunité contre les poursuites pour l’acte de vente de sexe, reflétant l’intention de la loi de les protéger plutôt que de les punir.

Restrictions sur la publicité : Il est illégal de faire de la publicité pour la vente de services sexuels, bien que les travailleurs du sexe eux-mêmes soient exemptés de cette disposition s’ils font la publicité de leurs propres services. Cela vise à prévenir l’exploitation par des tiers.

Les principaux objectifs de la PCEPA sont de réduire la prévalence de la prostitution, de protéger les communautés et de soutenir les travailleurs du sexe dans leur sortie du commerce. En ciblant le côté demande de la prostitution et ceux qui exploitent les travailleurs du sexe, la loi cherche à créer un environnement plus sûr pour les personnes impliquées dans la prostitution et à décourager cette pratique dans son ensemble.

Cependant, la PCEPA a fait l’objet de critiques importantes. Les opposants soutiennent qu’en criminalisant l’achat de sexe et les activités connexes, la loi continue de mettre en danger les travailleurs du sexe. De nombreux travailleurs du sexe et groupes de défense affirment que la législation les oblige à opérer dans des conditions plus clandestines et dangereuses pour éviter d’être détectés par les forces de l’ordre. Cela peut entraîner une augmentation de la violence et de l’exploitation, contraire à l’intention protectrice de la loi.

Les partisans de la PCEPA soutiennent que la loi s’aligne sur le modèle nordique de législation sur la prostitution, adopté dans des pays comme la Suède et la Norvège. Ce modèle considère la prostitution comme une forme d’exploitation et cherche à la réduire en ciblant les acheteurs et les tiers, tout en offrant des services de soutien à ceux qui souhaitent quitter le commerce du sexe.

Les opposants, y compris de nombreux travailleurs du sexe, groupes de défense et organisations de défense des droits de l’homme, soutiennent que la loi n’atteint pas ses objectifs protecteurs. Ils soutiennent que la décriminalisation ou la légalisation, associées à des services de soutien robustes, garantiraient mieux la sécurité et les droits des travailleurs du sexe. La criminalisation des clients et des activités associées peut perpétuer la stigmatisation et la discrimination à l’encontre des travailleurs du sexe, poussant le commerce encore plus dans la clandestinité et augmentant les risques.

Comparativement, les pays du monde adoptent des approches variées à la prostitution. Par exemple :

Légalisation et réglementation : Dans des pays comme l’Allemagne et les Pays-Bas, la prostitution est légale et réglementée. Les travailleurs du sexe ont accès à des services de santé, des droits du travail et des protections juridiques, ce que les partisans estiment améliorer la sécurité et les conditions de travail.

Décriminalisation complète : La Nouvelle-Zélande est souvent citée comme un modèle de décriminalisation complète. La loi de 2003 sur la réforme de la prostitution a décriminalisé tous les aspects du travail sexuel adulte, se concentrant sur l’amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs du sexe grâce à une supervision réglementaire et à des services de soutien.

Criminalisation : En revanche, des pays comme les États-Unis (à l’exception de certains comtés du Nevada) maintiennent une criminalisation stricte de la vente et de l’achat de services sexuels. Cette approche entraîne souvent des défis juridiques et sociaux importants pour les travailleurs du sexe.

Au Canada, le débat sur la meilleure approche légale de la prostitution se poursuit. La PCEPA représente une tentative de concilier les réalités complexes du commerce du sexe, visant à réduire l’exploitation tout en protégeant les individus vulnérables. Cependant, son efficacité reste controversée. Le gouvernement canadien, les groupes de défense et les travailleurs du sexe continuent de discuter des réformes potentielles et des moyens les plus efficaces d’assurer la sécurité, les droits et le bien-être des travailleurs du sexe.