Lenacapavir : Une avancée révolutionnaire qui pourrait mettre fin au VIH, mais à quel prix ?

Image

Roger-Luc Chayer (Image: IA / Gay Globe)

Le VIH/SIDA est considéré comme une véritable peste pour les communautés LGBTQ+ depuis près de 50 ans. À ses débuts, le virus du VIH a décimé nos communautés, souvent en l’espace de quelques mois. On estime qu’entre 1984 et 1995, près de 30 % des homosexuels des pays occidentaux, comme le Canada, les États-Unis ou l’Europe, sont décédés des complications liées au virus, notamment du SIDA.

En 1995, la découverte et l’utilisation des trithérapies ont permis de réduire considérablement le taux de mortalité, bien que le taux de transmission ait continué d’augmenter. En 2025, nous restons dans une boucle persistante, marquée par des hausses des cas de VIH suivies de quelques progrès scientifiques. Cependant, sur le plan global, ces avancées permettent principalement d’améliorer la qualité de vie des personnes atteintes, sans offrir de véritable guérison. De plus, la PrEP, qui est l’outil de prévention le plus efficace à ce jour, demeure inabordable dans de nombreuses régions du monde ou n’est pas prise au sérieux par la population qui se pense plus invulnérable que jamais.

ARRIVE LE LENACAPAVIR

Depuis quelques mois, plusieurs études sur un médicament appartenant à une toute nouvelle classe contre le VIH attirent l’attention : le lenacapavir. Ce traitement révolutionnaire ouvre des perspectives inédites. Depuis longtemps, les chercheurs cherchaient un moyen de contrôler la transmission et la réplication du VIH sans que le virus puisse développer de mutations. Avec ce nouveau médicament, il semble que cet objectif ait été atteint.

Non seulement le lenacapavir serait efficace à 98-100 % comme outil préventif, sous la forme de deux injections par an, mais il s’avère tout aussi performant dans le traitement des personnes atteintes, y compris celles devenues multi-résistantes aux traitements actuels. Pourquoi ? Parce que ce traitement cible une partie du virus qui ne mute pas, rendant ainsi l’approche bien plus stable et fiable.

COMMENT FONCTIONNE LE LENACAPAVIR ?

Selon le journaliste scientifique Joseph D. Brown du magazine The Mind Unleashed, le lenacapavir est un médicament révolutionnaire qui fait partie d’une nouvelle classe appelée inhibiteurs de la capside. Ce traitement agit sur la capside, une enveloppe protectrice du virus indispensable à son cycle de vie.

En se fixant à des parties spécifiques de la capside, le lenacapavir bloque plusieurs étapes essentielles pour la survie du virus. Il empêche l’ADN viral d’entrer dans le noyau des cellules hôtes, ce qui stoppe l’intégration du virus dans le génome de la cellule. De plus, il perturbe l’assemblage des nouvelles particules virales, entraînant la production de virus défectueux qui ne peuvent plus infecter d’autres cellules. Grâce à son mécanisme unique, le lenacapavir limite la réplication du VIH et ralentit sa propagation.

Le développement du lenacapavir a été rendu possible grâce à des études structurelles avancées sur la capside du VIH, qui ont permis d’identifier des sites clés pour une intervention thérapeutique. En ciblant précisément ces zones critiques, le lenacapavir offre un moyen très efficace de supprimer la réplication du VIH. Cela en fait une option précieuse, non seulement pour les patients ayant connu des échecs de traitement, mais également pour ceux recherchant des mesures préventives comme la prophylaxie pré-exposition (PrEP).

ESSAIS CLINIQUES CONCLUANTS

Le lenacapavir a démontré une efficacité remarquable dans la prévention des infections au VIH au sein de diverses populations grâce à des essais cliniques décisifs.

L’essai de phase 3 PURPOSE 1 a évalué l’efficacité du lenacapavir en tant que prophylaxie pré-exposition (PrEP) chez les femmes cisgenres en Afrique subsaharienne. L’analyse intermédiaire a révélé aucune infection au VIH parmi les participantes recevant le lenacapavir, indiquant une efficacité de 100 %. Cela a conduit à une levée anticipée de l’insu de l’essai en raison de l’atteinte des principaux objectifs d’efficacité.

PURPOSE 2, un autre essai de phase 3, a étudié l’efficacité du lenacapavir chez les hommes cisgenres, les hommes transgenres, les femmes transgenres et les personnes non binaires ayant des rapports sexuels avec des partenaires assignés hommes à la naissance. Mené dans plusieurs pays, dont l’Argentine, le Brésil, le Mexique, le Pérou, l’Afrique du Sud, la Thaïlande et les États-Unis, cet essai a montré une réduction de 96 % des infections au VIH par rapport à l’incidence de fond. Plus précisément, seuls deux cas d’infection ont été enregistrés parmi 2 180 participants, ce qui signifie que 99,9 % des participants du groupe lenacapavir n’ont pas contracté le VIH.

Dans les deux essais, le lenacapavir a montré une supériorité par rapport aux options de PrEP orale quotidienne, comme Truvada. La commodité d’une injection semestrielle permet de surmonter les défis liés à l’observance des traitements quotidiens, ce qui pourrait améliorer son efficacité dans des conditions réelles.

SURMONTER LA BARRIÈRE DES COÛTS

Toujours selon Joseph D. Brown, bien que le lenacapavir représente une avancée prometteuse dans la prévention du VIH, son prix actuel pose d’importants défis à son accessibilité généralisée, notamment dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Aux États-Unis, le lenacapavir est approuvé pour traiter le VIH multirésistant, avec un coût annuel supérieur à 40 000 $ par patient. De tels coûts élevés rendent le lenacapavir inaccessible dans les régions où les budgets de santé sont limités. Par exemple, dans des pays comme l’Ouganda, où les dépenses de santé annuelles par personne s’élèvent à environ 12 $, le prix actuel du lenacapavir est excessivement cher.

Les recherches indiquent que le lenacapavir pourrait être produit en masse à un coût considérablement plus bas. Des études suggèrent qu’avec des économies d’échelle et une fabrication générique, le médicament pourrait être produit pour aussi peu que 41 à 94 $ par personne et par an.

ACCESSIBILITÉ AU CANADA ET EN EUROPE

Selon le réseau CATIE, l’utilisation du lénacapavir a été approuvée en premier par les autorités de l’Union européenne, puis a récemment été approuvée au Canada, par Santé Canada. Le médicament est destiné aux personnes ayant acquis une résistance à de nombreux traitements et doit être utilisé en association avec d’autres médicaments. Les scientifiques appellent ce groupe des « personnes lourdement traitées ».

Son utilisation en tant que PrEP ou comme traitement unique contre le VIH reste à être approuvée. Si tout se déroule bien et rapidement, nous pourrions assister, pour la première fois de l’histoire, à la possible élimination du VIH.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

15 − 14 =