Par Roger-Luc Chayer
Collaboration Spéciale: Marc Mousseau
Tout le monde au Québec ne parle que de ça. Les manifestations étudiantes et leurs revendications visant à refuser toute augmentation des frais de scolarité. Les trois principaux leaders de ces mouvements de contestation, Martine Desjardins de la FEUQ, Léo Bureau-Blouin de la FECQ et Gabriel Nadeau-Dubois de la tristement célèbre CLASSÉ répètent tous les jours qu’ils reposent leurs revendications sur des centaines de milliers de futurs universitaires, sur les étudiants actuels et leur accès aux études supérieures.
Quand ils parlent de leur mandat, ils nous répètent continuellement que tous les étudiants du Québec et tous les jeunes dans les écoles secondaires et primaires bénéficient de leurs manifestations actuelles car au moment où ils iront à l’université, le combat aura été fait et ils pourront bénéficier des retombées, des économies donc, si les revendications sont acceptées et appliquées par la Ministre de l’éducation Line Beauchamp.
Or, depuis le début du conflit il y a près de 12 semaines maintenant, personne n’a soulevé une question pourtant fondamentale : Quelle est la représentativité exacte de ces trois leaders qui parlent au nom de tous les futurs étudiants en fondant leurs chiffres sur le nombre d’étudiants dans les écoles primaires et secondaires actuellement au Québec?
Hier, j’ai demandé à mon neveu de 15 ans, Marc M., de me donner son feed-back sur la situation des étudiants du secondaire qui manifestent maintenant à Montréal et à ma grande surprise il m’a répondu quelque chose de très simple dont personne ne parle nulle part : « Je trouve ça ridicule, parce que plusieurs personnes qui sont pour la grève n’iront pas a l’université…. ». Mais il a parfaitement raison!
Prenons en considération le taux d’abandon, de décrochage et d’échecs scolaires actuellement au Québec. Selon Statistiques Canada, en 2011, 29% des élèves du secteur public au secondaire décrochaient. Ajoutez à ce chiffre ceux qui font l’école buissonnière (35%), ceux qui sortent du secondaire avec un échec (11,5%) et on se retrouve avec un faramineux chiffre de près de 40% des étudiants du secondaire qui n’iront jamais à l’université.
Prenons maintenant un autre chiffre évocateur : Le nombre d’étudiants au CEGEP qui sont en technique et qui sortiront à la fin de leurs études avec un diplôme ne nécessitant aucune étude universitaire. Selon le portail du réseau collégial du Québec (lescegeps.com) 45% des étudiants inscrits au CEGEP le sont en diverses techniques. Ces étudiants n’iront donc jamais à l’université puisque le diplôme de technicien couronne leur passage au CEGEP.
En se fiant simplement à ces deux statistiques, il est facile de comprendre qu’une infime minorité, moins de 15% des étudiants du secondaire iront à l’université et sont susceptibles d’être concernés par le débat social actuel. C’est mon neveu de 15 ans qui a raison en qualifiant le débat actuel de ridicule car la plupart des personnes qui manifestent au CEGEP ou dans les écoles secondaires ces jours ci n’iront jamais à l’université.
Alors pourquoi manifester finalement? Voilà la vraie question. Est-ce que la Ministre Beauchamp sait au moins qu’elle n’est confrontée qu’à une poignée d’universitaires potentiels? Est-ce que les leaders étudiants exagèrent la portée de leur pertinence dans le débat sur la hausse des frais de scolarité? Et enfin, ces casseurs qui s’en prennent à la population et qui attaquent autant les entreprises privées que des symboles comme le métro de Montréal, est-ce que ce sont de vrais étudiants ou de fiers représentants des drop-outs du Québec?