BERTRAND VAC, UN ESPRIT LIBRE

Pierre Salducci

Auteur prolifique des années cinquante à deux mille, Bertrand Vac fait partie des écrivains qui ont participé à l’avènement du Québec moderne. Observateur attentif de son époque, il se montre souvent critique face aux conventions sociales, défendant notamment la liberté sexuelle et la liberté d’aimer. La récente réédition de son roman-fleuve À mon seul désir en livre numérique permet de redécouvrir l’importance de sa pensée et de son œuvre.

Figure emblématique du monde culturel québécois des années 50 et 60, Bertrand Vac a mené la carrière littéraire probablement la plus longue de l’histoire du pays, avec pas moins de 60 ans d’écriture et de publication. Réédité plusieurs fois en livre de poche, il est aujourd’hui considéré comme un classique de la littérature québécoise. Son œuvre immense et variée se distingue par son audace et son humour. Il a publié quatorze titres, dont sept romans, trois recueils de nouvelles, et a reçu pas moins de quatre prix littéraires prestigieux. Encensé par les uns et conspué par les autres, Bertrand Vac a connu le destin classique de ceux qui pensent autrement et n’hésitent pas à remettre les choses en cause. Différent, décalé sur à peu près tous les sujets, il était admiré par les esprits non conventionnels, mais incompris des autres, ce qui lui vaudra une certaine mise à l’écart. Malgré tout, plus de dix ans après sa mort, force est de souligner encore avec admiration la justesse, la sensibilité, l’impertinence et l’originalité de ses écrits comme de ses propos.

Grand ami des femmes et féministe avant l’heure, chantre de la beauté sous toutes ses formes, Bertrand Vac était loin d’être insensible à l’homosensualité. Il a longtemps fréquenté plusieurs figures d’homosexuels célèbres dont il était très proche. Resté célibataire toute sa vie, ce qui le rendait d’autant plus suspicieux dans le Québec janséniste de son époque, il n’a jamais cessé de revendiquer farouchement son indépendance, refusant de sacrifier son mode de vie pour qui que ce fût. Dans toute son œuvre, Bertrand Vac défend la liberté de penser, la liberté d’aimer et la liberté sexuelle. Autant de thèmes que l’on retrouve dans son dernier roman, À mon seul désir, à la fois fresque historique et saga familiale, qui couvre la vie de son héroïne de ses 16 ans à ses 50 ans et qui vient juste d’être réédité en version numérique. Près de 25 ans après sa première publication, ce roman-fleuve d’une liberté de ton souvent surprenante n’a rien perdu de sa force et de son pouvoir d’évocation.

Présenté comme une démarche totalement inédite dans l’ensemble de la littérature québécoise, À mon seul désir propose une peinture absolument unique de la grande bourgeoisie montréalaise au détour du XIXe et du XXe siècle, de son mode de vie, de ses drames et de ses passions. Mais bien plus qu’un cadre historique parfaitement reconstitué, il s’agit surtout d’une aventure romanesque puissante, aux nombreux rebondissements, qui suit le parcours et l’évolution d’une femme de cœur, attachante et déterminée, sur fond de première guerre mondiale, de crises économiques et d’avènement de la modernité. Un récit riche en découvertes et en émotions, qui emporte le lecteur dans un monde insoupçonné et captivant.


À mon seul désir, Bertrand Vac
Éditions Culture Commune, 8,99$

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