
Maître Claude Chamberland
De plus en plus les nouvelles lois, quand elles n’obligent carrément pas de soumettre un litige à un processus de médiation, le recommandent fortement et créent des avantages pour ceux qui s’y soumettent.
Par exemple, dans le projet de loi numéro 8 visant à améliorer l’efficacité et l’accessibilité de la justice, notamment en favorisant la médiation et l’arbitrage, déposé à l’Assemblée Nationale le 1er février 2023, il est prévu de modifier le Code de Procédure Civile afin d’instruire en priorité une demande accompagnée d’une attestation délivrée par un médiateur accrédité confirmant qu’elles ont eu recours à un mode privé de prévention et de règlement des différends. De plus, il y est également prévu que toute réclamation d’une valeur inférieure à 5000$ soit obligatoirement soumise à une médiation.
Or une des garanties les plus fondamentales du processus de médiation, qu’il s’agisse de questions commerciales, familiales ou simplement d’un litige à la division des Petites Créances de la Cour du Québec ou devant le Tribunal Administratif du Logement est celle de la confidentialité. À cet égard, l’article 4 du Code de Procédure Civile du Québec établit ce qui suit :
4. Confidentialité des modes privés : Les parties qui choisissent de prévenir un différend ou de régler celui qui les oppose par un mode privé et le tiers qui les assiste s’engagent à préserver la confidentialité de ce qui est dit, écrit ou fait dans le cours du processus, sous réserve de leur entente sur le sujet ou de dispositions particulières de la loi.
Mais quelle est la sanction appliquée en cas de manquement par une des parties au processus de confidentialité?
Et surtout, que peut faire une partie en cas de violation de la confidentialité par une partie qui, par exemple, produirait au dossier de Cour un document confidentiel, le rendant ainsi accessible à des tiers, par exemple, des journalistes intéressés, qui consulteraient le dossier de Cour? Dans un premier temps, je suggérerais à une partie placée dans cette situation de tenter d’obtenir par tout moyen le retrait des documents produits en bris de l’obligation de confidentialité. Cela pourrait se faire par une démarche auprès du Greffier du tribunal où les documents ont été produits ou par une mise-en-demeure adressée à la partie qui a produit illégalement un document de le retirer dans un délai très court sous peine de se rendre passible de dommages punitifs. En dernier recours, on pourra présenter une requête à un juge ayant juridiction sur cette question afin de faire retirer les pièces illégalement produites ou à tout le moins pour les mettre sous scellé le temps qu’un juge examine les arguments des parties.
Mais pourquoi un juge devrait-il examiner les arguments de la partie défaillante si la confidentialité de la médiation est un principe absolu?
D’une part, parce qu’un important principe de justice naturelle à la base de tout état de droit exige que toute partie à un litige ait la possibilité d’être dûment entendue par un tribunal indépendant.
Mais d’autre part, parce qu’il existe une importante exception à la règle de confidentialité établie par la Cour Suprême du Canada dans l’affaire Union Carbide Inc. c. Bombardier Inc., 2014 CSC 35 (« Union Carbide ») : il s’agit de ce qu’on appelle en langage juridique « l’exception au privilège relatif aux règlements », une exception qui permet de lever la confidentialité pour faire la preuve des modalités d’un règlement ou d’une entente.
Dans « Union Carbide », les parties avaient convenu d’une médiation privée et signé une entente type de médiation, laquelle renfermait la clause suivante concernant la confidentialité du processus : « Rien de ce qui pourra être dit ou écrit au cours de la médiation ne sera allégué, mentionné ou présenté en preuve dans le cadre d’une instance ».
Or malgré l’existence de cette clause, malgré également la reconnaissance par la loi elle-même de la confidentialité du processus de médiation, la Cour Suprême a choisi d’appliquer, même dans un litige de droit civil québécois, un principe de common law à l’effet qu’une commu-nication qui a conduit à un règlement cesse d’être privilégiée si sa divulgation est nécessaire pour prouver l’existence ou la portée du règlement. Ainsi, à moins que les parties, dans un contrat beaucoup plus spécifique que les contrats de médiation standard, décident d’écarter de façon claire cette « exception au privilège relatif aux règlements », elle s’appliquera et une des parties pourra tenter de prouver qu’une entente a été conclue en produisant un élément de preuve issu de la médiation.
Depuis « Union Carbide », le législateur a intégré l’exception au privilège relatif aux règlements dans son corpus législatif et réglementaire. Par exemple, les Règles de procédure régissant la médiation de la Régie de l’énergie, adoptées en 2018, ouvrent la section intitulée « Confiden-tialité » avec l’article 11 qui se lit comme suit :
11. Le médiateur et les parties à la média-tion doivent préserver la confidentialité de ce qui est dit, écrit ou fait dans le cours de la médiation, sous réserve de leur entente sur le sujet ou des dispositions particulières de la loi.
D’ailleurs, l’article 4 du Code de procédure civile entré en vigueur en 2016 et reproduit au début de cet article est exactement au même effet dans sa dernière partie.
Rappelons donc pour terminer que malgré cette exception au principe de confiden-tialité que voudrait soulever une partie qui allègue qu’un règlement de l’affaire est intervenu, il faudra tout-de-même, jusqu’à ce que le juge ait tranché la question, que les documents et autres informations confidentielles alléguées pour tenter de prouver l’entente soient mis sous scellé et interdits d’accès au public tant et aussi longtemps que le juge n’aura pas tranché la question. Sans cette mesure provision-nelle, tout le débat deviendrait académique puisque des tiers intéressés pourraient prendre connaissance d’un contenu confidentiel pendant l’instance.
L’Espagne adopte une loi permettant de changer librement de genre dès
16 ans
Selon: Lanouvellerépublique – Après des mois de débat parfois houleux au sein de la gauche au pouvoir, les députés espagnols ont adopté définitivement jeudi 16 février 2023 une loi permettant de changer librement de genre. Cheval de bataille du parti de gauche radicale Podemos, allié des socialistes au sein du gouvernement de Pedro Sánchez, cette loi dite « transgenre » permet aux personnes qui le souhaitent de faire changer leur genre sur leurs papiers d’identité via une simple déclaration administrative dès l’âge de 16 ans. Il ne sera donc plus nécessaire de fournir des rapports médicaux attestant d’une dysphorie de genre et des preuves d’un traitement hormonal suivi durant deux ans, comme c’était le cas jusqu’ici pour les personnes majeures.