Le rôle méconnu du chef de l’État du Canada

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Roger-Luc Chayer

Certains pays ont des chefs d’État qui sont des présidents, des princes ou des magistrats, mais au Canada, le chef de l’État est un Roi, actuellement Charles III, et il arrive souvent que la fonction de sa représentante, la Gouverneure générale, soit mal interprétée comme étant purement symbolique et inutile. Cependant, c’est une méprise.

En réalité, la plupart des Canadiens, y compris les Québécois, ont tendance à penser que le chef d’État du Canada est le Premier ministre, Justin Trudeau, ce qui est une erreur. Monsieur Trudeau est en effet le chef du gouvernement canadien, c’est-à-dire le dirigeant des élus à la Chambre des communes à Ottawa. Il représente certainement le gouvernement canadien au niveau international, mais il ne représente pas l’État canadien ni ses institutions constitutionnelles, et encore moins le Roi Charles III, dont il est le conseiller politique.

En discutant cette semaine avec un retraité québécois, ce dernier m’a exprimé avec conviction son point de vue selon lequel la fonction de la Gouverneure générale du Canada était inutile et constituait un gaspillage d’argent. Il allait même jusqu’à suggérer que le Canada devrait abolir ce poste, qu’il considérait comme purement honorifique et coûteux pour les contribuables canadiens. Malgré son assurance dans ses opinions, il convient de noter qu’il avait tort. Voici pourquoi…

Tout d’abord, on ne peut pas abolir le poste du représentant du Roi puisqu’il est enchâssé dans la constitution canadienne. La modification de la Constitution canadienne est un processus complexe qui nécessite un consensus entre le gouvernement fédéral et les provinces. Les règles pour modifier la Constitution canadienne sont énoncées dans la Loi constitutionnelle de 1982, qui comprend la Charte canadienne des droits et libertés. Les principales règles pour modifier la Constitution canadienne sont les suivantes :

  1. L’accord des provinces : Pour apporter des modifications majeures à la Constitution canadienne, il est nécessaire d’obtenir l’accord de la majorité des provinces qui représentent au moins 50 % de la population du Canada. En d’autres termes, sept provinces ou plus représentant au moins 50 % de la population canadienne doivent donner leur consentement.
  2. L’accord du gouvernement fédéral : En plus de l’accord des provinces, le gouvernement fédéral doit également être d’accord avec la modification proposée.
  3. La résolution parlementaire : Une fois qu’un consensus est atteint entre le gouvernement fédéral et les provinces, une résolution doit être adoptée par le Parlement du Canada. Cela signifie que le projet de loi de modification constitutionnelle doit être approuvé à la fois par la Chambre des communes et le Sénat.
  4. La ratification provinciale : Après avoir été adoptée par le Parlement fédéral, la modification constitutionnelle doit être ratifiée par toutes les provinces et les territoires. Cela signifie que chaque province et territoire doit adopter la résolution de modification conformément à ses propres procédures législatives. Dans certaines provinces, cela peut nécessiter une approbation par voie de référendum.
  5. La déclaration royale : Une fois que toutes les provinces et les territoires ont ratifié la modification constitutionnelle, le gouverneur général du Canada (agissant au nom du monarque) donne la sanction royale, ce qui signifie que la modification est officiellement incorporée à la Constitution canadienne.
  6. La proclamation : Une fois la sanction royale obtenue, la modification constitutionnelle est proclamée en vigueur à une date déterminée.
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Mais ce n’est pas tout, abolir le poste de règle n’éliminerait pas le problème de la position du chef d’État au Canada. Si le Canada allait jusqu’à abolir la fonction du Roi Charles III en tant que chef d’État, il n’y aurait encore une fois aucune économie à réaliser, car en vertu du changement constitutionnel résultant, il faudrait remplacer le Roi par un Président. La nomination d’un Président ne serait pas nécessairement une manière d’économiser des frais, qui, au passage, ne se chiffrent pas en dizaines de millions, mais sont bien moindres.

Le rôle du Roi du Canada est principalement honorifique et symbolique, conformément au système constitutionnel canadien. Le Canada est une monarchie constitutionnelle, ce qui signifie que le chef de l’État est le monarque britannique, actuellement Charles III. Cependant, la gouvernance quotidienne du pays est assurée par le gouvernement canadien, dirigé par le Premier ministre.

Voici les principales fonctions et rôles du Roi du Canada :

  1. Représentation symbolique : Le Roi du Canada représente la continuité historique et symbolique de l’État canadien en tant que chef de l’État. En tant que symbole de l’unité nationale, il joue un rôle important lors d’événements officiels, de cérémonies et de visites d’État.
  2. Signature de lois : Le Roi doit donner la sanction royale à toutes les lois adoptées par le Parlement canadien pour qu’elles deviennent officiellement des lois. Cependant, cette sanction est accordée sur l’avis du Premier ministre et est essentiellement une formalité.
  3. Ouverture du Parlement : Le Roi ouvre officiellement chaque nouvelle session du Parlement du Canada, lisant le discours du Trône, qui expose le programme législatif du gouvernement.
  4. Nomination du gouverneur général : Le Roi nomme le gouverneur général du Canada sur recommandation du Premier ministre. Le gouverneur général est le représentant du Roi au Canada et exerce diverses fonctions constitutionnelles, y compris la sanction royale des lois en l’absence du Roi.
  5. Apparence sur la monnaie et les timbres : L’image du Roi du Canada apparaît sur les billets de banque, les pièces de monnaie et les timbres canadiens en tant que symbole de la souveraineté.
  6. Commandant en chef des Forces armées canadiennes : Le Roi détient le titre de commandant en chef des Forces armées canadiennes, bien que la gestion opérationnelle des forces militaires soit exercée par le gouvernement canadien.
  7. Promulgation de nominations et distinctions honorifiques : Le Roi accorde des distinctions honorifiques canadiennes, telles que l’Ordre du Canada, sur recommandation du gouvernement.

En conclusion, que le Canada ait un Roi ou un Président comme chef d’État, les coûts seraient probablement les mêmes puisque la fonction resterait inchangée. La présence d’un chef d’État distinct du chef du gouvernement permet de séparer les pouvoirs, ce qui est essentiel pour prévenir d’éventuels abus de pouvoir, comme cela a été observé aux États-Unis sous la présidence de Donald Trump ou en Russie avec Vladimir Poutine. Cette séparation des pouvoirs est une caractéristique fondamentale de la démocratie canadienne.

Vive le Canada, Vive le Premier ministre et Vive le Roi !

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