EXCLU TÊTU – Dans le monde, seule une personne LGBTI+ sur 10 envisage « aisément » son avenir

Par Têtu

Une majorité de jeunes LGBTI+ ne parvient pas à se projeter dans l’avenir, selon une grande consultation mondiale menée par le MAG Jeunes LGBT avec l’Unesco. Des résultats « dramatiques », selon la co-auteure de l’étude.
« Les jeunes LGBTI+ font face quotidiennement à la discrimination et la marginalisation. » C’est ce qu’affirme d’emblée une grande enquête sur l’éducation inclusive et l’accès à la santé des jeunes LGBTI+ dans le monde, menée par le MAG Jeunes LGBT en collaboration avec l’Unesco et dont TÊTU révèle en exclusivité les résultats ce mardi 16 octobre.
En tout, 21.528 personnes LGBTI+ âgées de 12 à 26 ans et venant de 108 pays différents ont été interrogées. Les résultats sont classés par zone géographique : Asie et Pacifique (59,46%) ; Asie centrale/Europe centrale et orientale (19,21%) ; Amérique du nord/Europe occidentale (11,89%) ; Amérique latine/Caraïbes (7,02%) ; Etats arabes (2,15%) et enfin Afrique sub-saharienne (0,27%).

A l’échelle mondiale, plus de deux interrogés sur 10 se sentent « rarement » (22,02%), voire « jamais » (14,89%) en sécurité. Dans le détail, c’est dans les Etats arabes que le sentiment d’insécurité est le plus fort (57,48%) et en Afrique Subsaharienne (35,09%).

Sentiment d’abandon
Autre chiffre : neuf jeunes LGBTI+ sur 10 (91,02%) estiment ne pas être pris en compte par les autorités de leur pays lors de la prise de décisions, ou qu’ils ne « pèsent pas » dans la balance des pouvoirs publics. Cette proportion n’est guère mieux en France où 81.10% des jeunes LGBTI+ estiment ne pas importer aux yeux des autorités.

Un élément de l’enquête est particulièrement inquiétant : près de la moitié des jeunes sondés disent ne pas être en mesure de se projeter « du tout » ou « partiellement » en tant qu’adultes LGBTI+ dans le pays où ils résident. En France, plus de la moitié (51.31%) des personnes interrogées disent ne pouvoir se projeter que « partiellement » dans le futur.
« Cela n’est probablement pas étranger aux gains juridiques qu’il reste à réaliser pour améliorer le sort de ces populations, à la (re)montée des discours homophobes liée aux tergiversations du gouvernement Macron autour de la PMA, et au peu de visibilité positive des personnes LGBTI dans les médias », analyse pour TÊTU Gabrielle Richard, co-auteure de l’enquête et chercheuse à l’université de Paris-Est Créteil.

Des violences scolaires bien réelles
Un autre chiffre a attiré notre attention : celui des violences en milieu scolaire. Ce ne sont pas moins de 42% des jeunes LGBTI+ qui déclarent avoir été ridiculisés, taquinés, insultés ou menacés à l’école en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre.

En France, le chiffre est particulièrement alarmant puisque une personne interrogée sur deux (51,78%) assure avoir été victime de violences verbales. « Il s’agit d’une proportion élevée, qui n’étonnera pourtant pas quiconque travaille ou intervient en milieu scolaire, rapporte Gabrielle Richard. On continue d’assister – et la France ne fait pas figure d’exception sur cette question – à une banalisation des insultes et des comportements homophobes, sous prétexte qu’il s’agirait simplement de la manière dont les jeunes interagissent entre eux. »
Et c’est encore pire dans les Etats Arabes, où 68% des jeunes LGBTI+ affirment avoir été victimes de violences verbales et 30% de sévices physiques. Au global, l’enquête a montré que ce sont majoritairement les hommes (GBT+) qui sont touchés par ces violences.

Mauvais accès à la santé
Le deuxième aspect de cette consultation porte sur la santé. En Amérique du Nord/Europe occidentale, 47,18% des jeunes ont parlé de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre à une personne responsable de leur santé contre 11,35% en Asie et Pacifique et 32,68% dans les pays arabes.
Le problème, c’est que lorsqu’ils arrivent à en parler, une majorité (61,29%) des jeunes LGBTI+ déclarent avoir été mal accueillis ou ne pas s’être sentis en sécurité au cours de cette rencontre.
Concernant ceux qui n’en ont pas parlé, plus du tiers des jeunes ont déclaré craindre que leurs informations personnelles ne soient divulguées à des tiers (37,60%) ou faire l’objet de jugements (36,24%). Enfin, un quart (26,40%) d’entre eux ont estimé qu’aucun spécialiste n’était disponible pour les personnes LGBTI+.

Des résultats « dramatiques »
Autant de constats qui inquiètent les auteur.e.s de cette enquête, comme Gabrielle Richard qui conclut, amère :
« Le portrait des expériences des jeunes LGBTI+ que permet de tirer cette consultation globale est négatif, voire dramatique, et devrait être interprété comme une sonnette d’alarme par les organisations internationales comme par les pouvoirs publics locaux. Il n’est pas normal, en 2018, que l’école et le système de santé, des lieux qui devraient par définition se faire accueillants pour les jeunes LGBTI+, soient au contraire ceux par lesquels se joue et se reconduit leur exclusion. »

Cette consultation a été réalisée par le Mag Jeunes LGBT avec le soutien de l’Unesco du 22 juin au 11 juillet 2018 auprès de 21.528 personnes âgées de 12 à 26 ans dans 108 pays via des questionnaire d’enquêtes en ligne.

En savoir plus sur https://tetu.com/2018/10/16/exclu-tetu-dans-le-monde-seule-une-personne-lgbti-sur-10-envisage-aisement-son-avenir/#0T12tWaMJaRaXLBs.99