The American Heart Journal, la bible mensuelle de la cardiologie,
publie dans sa livraison dʼavril une étude qui évalue le rapport béné-
fice-risque de la pratique de la prière. Ce travail est signé de seize pra-
ticiens dirigés par les docteurs Herbert Benson et Patricia L. Hibberd.
Sʼil sʼagit bien ici de prière – cet acte de religion par lequel on sʼadresse
à Dieu pour lʼimplorer ou pour lʼadorer -, il faut préciser quʼil sʼagit
de prières collectives effectuées pour le bénéfice potentiel de tierces
personnes.
Les auteurs de la publication de lʼAmerican Heart Journal précisent,
en introduction de leur article, quʼil sʼagit là de pratiques très répan-
dues dans certaines congrégations religieuses, mais que ces pratiques
nʼont pas, jusquʼici, fait la preuve scientifique de leur efficacité. Le
temps était donc venu de faire la lumière en usant des outils métho-
dologiques habituellement utilisés en médecine pour établir un lien
de causalité et faire la part du hasard. Ce travail a été conduit auprès
de 1 802 personnes ayant subi, entre janvier 1998 et novembre 2000,
dans six établissements hospitaliers américains, un ou plusieurs pon-
tages aorto-coronariens – intervention chirurgicale très répandue qui
consiste à modifier le circuit de la vascularisation du muscle cardia-
que chez des personnes exposées au risque dʼinfarctus du myocard
Trois congrégations religieuses, deux catholiques et une protestante,
ont été chargées de prier pour «la réussite de lʼopération chirurgicale et
une guérison rapide sans complications» des malades dont elles rece-
vaient le prénom et lʼinitiale du nom de famille.
Les auteurs de ce travail en tirent deux conclusions. Non seulement
cette forme de prière nʼa pas, ici et dans cette indication, démontré la
preuve de son efficacité, mais il est désormais établi quʼelle peut avoir
des effets nocifs. Du moins quand les malades savent que des inconnus
sʼadressent à Dieu pour implorer quʼIl oeuvre à prévenir les complica-
tions dʼun pontage aorto-coronarien.
Comment comprendre ? Les auteurs expliquent ce résultat, non sans un
certain bon sens, par le stress subi par des patients inquiets de se savoir
à ce point malades «que lʼon avait dû avoir recours, les concernant, à
un groupe de prière». The New York Times précise que cette étude, qui
nʼétait en aucune manière destinée à «déterminer si Dieu existe ou sʼIl
exauce ou non les prières», a coûté 2,4 millions de dollars. Une somme
pour lʼessentiel fournie par la Fondation religieuse John-Templeton…