Le jeu de la honte des thérapies de conversion pour homosexuels

Radio-Canada

À leur propre demande, Gabriel Nadeau et Pénélope Tessier ont suivi des formes de thérapies de réorientation sexuelle lors desquelles ils ont dû confesser tous les détails au sujet de leur sexualité. Issus de milieux religieux, ils étaient convaincus que cette partie d’eux-mêmes était mauvaise et ils ont longtemps vécu dans le déni de leur propre sexualité. En compagnie de l’étudiante en anthropologie Alex Saulnier et du psychiatre Richard Montoro, ils expliquent à Catherine Perrin que ces thérapies non éthiques visent à repérer l’inconfort des sujets et à le maximiser.

« Ça a commencé à 12 ans. C’est moi qui ai demandé de vivre une séance d’exorcisme », raconte Gabriel, dont la famille était pentecôtiste. « J’ai annoncé à ma mère que j’avais ces désirs-là. Avant, je n’en parlais pas. Je lui ai dit : « J’aimerais ça, changer. Je ne veux pas être comme ça. » »

Dommageables sous-entendus

Gabriel Nadeau estime que les messages implicites de son entourage l’ont amené à voir ses pulsions comme quelque chose de nuisible : « Tout ton réseau, les gens qui sont les plus importants pour toi, mettent l’acceptation de ta personne en jeu. [Ils te disent :] « Ça, ce n’est pas acceptable, et si tu n’essaies pas de changer, de te conformer à nos manières de voir les choses, tu ne fais plus partie de nos vies. » »

Déni et refus

Pénélope Tessier, élevée dans une famille protestante évangélique, a vécu quelque chose de semblable. « J’étais la première à lever la main pour qu’on m’enlève ça, pour qu’on change ça, pour trouver une solution à ces attirances-là, se souvient-elle. Longtemps, j’ai vécu dans le déni. Pour moi, quelqu’un d’attiré par les filles, ce n’était pas quelque chose de naturel. C’était presque une perversion. Donc, je ne m’associais pas à l’idée que je me faisais de l’homosexualité. Quand j’ai eu à faire face à ces attirances, c’est comme si [il y a avait] un dégoût de cette partie-là de ma personne. J’étais la première à vouloir que ça change ou à refuser ces attirances. »

Oui, ça existe au Québec

Alex Saulnier a effectué une étude sur les thérapies de conversion sexuelle au Canada à la demande d’organismes. « Honnêtement, quand je suis entrée dans l’enquête, je n’étais pas au courant que ça existait au Québec. Quand j’ai lancé le questionnaire en ligne et que j’ai vu les réponses arriver, je me suis prise la tête à quelques reprises en lisant les témoignages des gens. »

Non éthique et dangereux

Richard Montoro confirme que la quasi-totalité des gens qui suivent ou imposent ces thérapies viennent de milieux religieux. « Ce n’est pas loin de 100 %, dit-il. Au Québec comme au Canada, les associations psychiatriques, psychologiques ou en travail social sont toutes d’accord pour dire que c’est une pratique non éthique. Donc, souvent, les gens se réfugient derrière les droits de la liberté religieuse. »

« Ça a été prouvé scientifiquement à maintes reprises que la réorientation sexuelle ne marche pas, rappelle-t-il. On fait un traitement qui a simplement [pour effet] de rendre ces gens-là plus malades. »

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