LOI: LES ENQUÊTES DE CRÉDIT

Maître Claude Chamberland, avocat

Q: Bonjour Maître Chamberland. Je suis la propriétaire d’un petit immeuble et j’ai parfois des problèmes avec des locataires qui quittent en me devant des mois de loyer. Des amis m’ont proposé de faire appel à une entreprise qui enquête sur les antécédents des locataires mais j’ai lu que ce n’était peut-être pas légal. Pouvez-vous me dire quelles informations puis-je obtenir de mes futurs locataires? -A.R.
R: Bonjour Madame A.R., comme régulièrement dans la pratique du droit, les tribunaux doivent tracer la ligne entre deux positions tout-à-fait légitimes, soit dans ce cas-ci, le droit du propriétaire d’un logement d’obtenir des données perti-nentes et nécessaires pour évaluer la candidature d’un locataire potentiel, versus le droit du candidat locataire à la protection de sa vie privée. Traditionnellement, depuis une décision de la Commission d’Accès à l’Information (CAI) rendue en 2003, il n’était pas permis pour un locateur d’exiger du candidat locataire des informations comme le numéro d’assurance sociale, l’occu-pation, l’employeur, ses coordonnées et le nombre d’années à son emploi, le salaire annuel, le nom et les coordonnées de la succursale bancaire, le spécimen de chèque, le numéro de permis de conduire, la marque, la couleur et le numéro de plaque de sa voiture. On a alors jugé qu’au contact initial avec un candidat locataire, seuls ses noms, prénom et numéro de téléphone, ainsi que les noms et coordonnées du locateur des logements occupés par ce candidat étaient néces-saires pour établir ses habitudes de paiement et son comportement antérieur.
Toutefois, plus récemment, la Cour du Québec est venue accueillir un appel visant à faire cesser une entreprise de location de logements de recueillir des renseignements non nécessaires du demandeur/locataire, notamment son numéro d’assurance sociale, le nom de son employeur, son salaire et les coordonnées de son institution financière. Selon la Cour du Québec, l’ordonnance de la CAI est déraisonnable par rapport à sa conclusion qui a pour effet d’entraver la poursuite des fins légitimes de constituer un dossier sur un locataire occupant un logement, avec des données pertinentes et nécessaires pour évaluer sa candidature, et ce, tout en protégeant la vie privée de cette personne.
Comment alors s’y retrouver dans tout ceci? Il est évident que dans le contexte actuel de pénurie de logements, en particulier dans la région métropolitaine, les propriétaires peuvent être tentés de profiter de la situation et de faire préparer des questionnaires où une foule de rensei-gnements non-indispensables à l’établis-sement d’une relation contractuelle viable sont demandés à leurs candidats loca-taires. Ce n’est pas une bonne idée. Même si les tribunaux n’ont pas permis à la CAI de procéder aux interdictions précises qu’elle voulait formuler, j’invite les propriétaires à faire preuve de prudence puisqu’en dernier ressort il appartiendra au Tribunal Admi-nistratif du Logement d’évaluer au cas par cas la légalité des informations demandées et d’en sanctionner le non-respect en conséquence. Que peut-on demander dans ce cas? À mon avis, seules peuvent être exigées les informations directement liées aux habitudes de paiement et au comportement antérieur d’un candidat locataire, à moins que cette personne ne présente elle-même des éléments à cet effet pour « promouvoir sa candidature » ce qui n’est pas interdit…

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