
VIH.org
Il est toujours intéressant dans ces conférences internationales sur le VIH/sida, même américano-centrées, de quitter un peu le chemin des études randomisées pour aller voir un peu ce qui se passe dans la «vraie vie». C’est le cas par exemple avec les posters du CDC sur l’usage de la PrEP aux États-Unis, avec ses déterminants, ses iniquités, ses singularités populationnelles et les efforts déployés pour les gommer. Si la France est pionnière sur bien des aspects avec les essais ANRS-MIE (Ipergay, Prevenir, DoxyVac), l’Amérique a pris de l’avance et elle a pour elle le poids du nombre. Rappelons que plusieurs formes de PrEP ont été approuvés par la FDA: le fumarate de ténofovir disoproxil et emtricitabine (TDF/FTC) en juillet 2012, le ténofovir alafénamide et emtricitabine (TAF/FTC) en octobre 2019, le TDF/FTC générique en juillet 2020 et le cabotégravir injectable à action prolongée (CAB-LA) en décembre 2021.
La conclusion en est que même sous un sous-groupe cette large étude montre une moindre adhérence (50%) des femmes à la PrEP orale d’où la nécessité de développer d’autres méthodes préventives telles que les anneaux vaginaux, les injectables les implants…
Aux États-Unis, toujours, mais la CROI n’a jamais été aussi recentrée sur ses ressortissants —combien de français présents? quelques dizaines?—, les afro-américains et les hispaniques (ou latinos) sont des populations avec une incidence élevée du VIH mais une faible couverture de la PrEP malgré des indications de PrEP évidentes. Les données de Medicaid aux Etats-Unis incluant la race/ethnicité sont très utiles pour comprendre. Ainsi le CDC s’est aussi penché sur les données des Centers for Medicare et Medicaid Services dans 50 États américains et le District de Columbia pour estimer le nombre de prescriptions de PrEP de 2015 à 2020 par sexe, groupe d’âge et origine ethnique. Le nombre de personnes auxquelles la PrEP a été prescrite y a augmenté dans toutes les populations, mais des disparités raciales/ethniques persistantes ont été observées et aggravée chez les hommes. Les cas (rares) d’infection VIH sous PrEP injectable par cabotégravir aux États-Unis sont l’objet d’une attention particulière durant cette CROI. Ils ont même leur acronyme, LEVI, pour Long-acting Early Viral Inhibition syndrome. Raisons de cette attention? La difficulté du diagnostic car les tests Elisa de 4éme génération sont pris à défaut, le retard au diagnostic amplifié par le fait que le patient n’est vu que de manière espacée, l’émergence de résistance due à la poursuite de l’injection préventive faute de diagnostic en temps réel…etc.
Et puis côté plus futuriste, on retiendra les analyses pharmacologiques d’un insert intra rectal chez 17 hommes et 6 femmes. L’objet novateur a la forme d’un suppositoire qui diffuse deux antiré-troviraux, le TAF et l’elvitégravir. Données pharmacologiques encoura-geantes. Plus futuriste encore et là nous sommes dans un modèle simien : l’implant ultra long acting d’islatravir (# 165) présenté par Alessandro Grattoni. Il se présente sous la forme d’un boitier implanté sous la peau de l’animal et que l’on peut remplir régulièrement du produit long acting. Ingénieux. A voir chez l’humain.