Par: Maître Claude Chamberland, avocat et médiateur accrédité à la Cour des Petites Créances.
La vie, hélas, place souvent une personne que nous aimons en situation de vulnérabilité. Que ce soit un enfant atteint d’un trouble du spectre de l’autisme, un conjoint subitement frappé par un AVC, un parent vieillissant perdant graduellement son autonomie à un degré divers, chaque situation est unique et demanderait un encadrement particulier.
Vous avez peut-être remarqué l’excellente campagne d’information parrainée depuis quelques mois par l’écrivaine Kim Thúy à propos de l’adoption prochaine (juin 2022) d’une nouvelle loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité et qui ferait du Québec une des sociétés les plus avancées en la matière.
La loi actuelle établissait trois niveaux de protection aux personnes et aux biens: la curatelle, la tutelle et le conseiller qui, en pratique, ne servait pas à grand-chose. La nouvelle loi simplifie et personnalise l’aide en ne conservant pour une personne en situation d’incapacité que le régime de la tutelle, qui pourra maintenant être modulé pour tenir compte des besoins précis de la personne et de sa situation particulière.
Ainsi, le tribunal qui appréciera un dossier devra rendre une décision attribuant le plus possible de pouvoirs résiduels à une personne dont il constate l’incapacité. La révision du dossier pourra se faire à tout moment sur simple preuve d’un changement de situation. Toutefois le changement le plus révolutionnaire de la nouvelle loi est la création de la fonction d’assistant, laquelle sera constatée dans un registre national public permettant d’éviter la multiplication des demandes de procurations de toutes sortes par chaque fournisseur de service auquel le citoyen a affaire: employeur, établissement de santé, locateur, opérateur de télécommunications, etc.
La mesure d’assistance ne nécessitera pas l’intervention d’un tribunal et permettra à une personne vivant une difficulté d’être aidée dans certaines situations par un ou deux assistants qu’elle aura elle-même choisi(s).
De plus, il ne sera pas nécessaire de faire la preuve d’une incapacité pour se doter d’un assistant. Grâce à une seule démarche, l’assistant sera officiellement reconnu par tous les tiers (entreprises, ministères et organismes, professionnels, etc.) comme l’intermédiaire de la personne assistée.
Ainsi une fois nommée, toute personne portant un intérêt particulier à celle qui a besoin d’un assistant pourra agir comme intermédiaire pour elle, avoir accès aux informations de son dossier, conseiller la personne assistée et communiquer avec des tiers afin d’obtenir et de transmettre des informations ou des décisions.
Dorénavant, il suffira donc que la personne qui souhaite être assistée ou son représentant légal fasse une demande (en ligne ou papier) au Curateur Public dans un formulaire prévu à cette fin en fournissant une pièce d’identité et un état sommaire de son patrimoine.
L’assistant proposé, de son côté, devra également fournir une pièce d’identité et une déclaration d’absence de conflit d’intérêts. Par la suite, le Curateur-public vérifiera que l’assistant projeté n’a pas d’antécédent criminel, il notifiera la demande à au moins deux proches de la personne assistée et traitera les avis d’opposition de ces proches le cas échéant.
Finalement, il rencontrera individuellement la personne souhaitant être assistée et l’assistant proposé, puis il les rencontrera ensemble, rendra sa décision, la communiquera aux intéressés et inscrira le nom de l’assistant au Registre si la rencontre est positive.