LES 400 MOTS DE RÉJEAN THOMAS: 137

Réjean Thomas

On me demande souvent pourquoi les jeunes continuent de s’infecter au VIH après toutes les campagnes d’information qu’on a eu, et je leur réponds «à quelle campagne vous pensez?» Les personnes ne sont pas capables de me répondre, parce que moi la dernière dont je me souviens est celle avec Marie-Soleil Tougas, dans les années 90… C’est rendu que le 1er décembre, il n’y a plus de campagnes! Avant, il y avait des campagnes canadiennes, québécoises, mais l’information n’est plus aussi présente que ça ce qui fait qu’on observe que les jeunes générations n’ont aucune information sur le VIH ce qui fait que l’épidémie continue!

Il n’y a pas assez de campagnes concernant l’explosion des ITS actuellement. On oublie que le VIH est une ITS alors si on prévient, si on fait des campagnes de prévention sur les ITS, il faut inclure le VIH là-dedans car les impacts sont importants. Dans le rapport annuel de l’Institut national de santé publique publié vendredi dernier, on ne voit aucune diminution du VIH et ça m’a un peu étonné parce qu’au mois d’août, on avait sorti une nouvelle selon laquelle il y avait une baisse de 35% chez les hommes homosexuels à Montréal, et là, dans les dernières stats, il n’y a aucune baisse. En fait, le nombre de cas est stable depuis au moins 10 ans. Pour 2018, on parle de 671 cas. C’est quand même assez décourageant quand tu lis ça! J’essaie de comprendre, mais je ne comprends pas! 67% des nouveaux diagnostics du VIH n’avaient jamais eu de dépistage auparavant, et 25% ont des CD4 en bas de 200, ça veut dire qu’ils sont porteurs et infectés depuis plusieurs années, avec un risque évidemment pour leur santé et aussi pour la santé publique. Ça, ce sont des statistiques quand même assez incroyables! On apprend que la majorité des cas est à Montréal, ça ce n’est pas une exception. On apprend aussi autre chose qui est intéressant.

Chez les hommes, c’est le groupe des 30-34 ans qui est le plus élevé. Moi, ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi ça ne diminue pas chez les hommes gais? 60% des cas sont à Montréal, ça veut quand même dire que 40% ne sont pas à Montréal… Avec l’accessibilité de la PrEP à Montréal, du moins dans ma clinique, j’ai une très grosse clientèle PrEP avec près de 3000 patients traités depuis 2016, et on n’a aucun cas de VIH chez ces personnes! Il y a des ITS chez certains de ces patients, mais 0 cas de VIH! Chez ces patients qui ont des ITS, c’est principalement associé au «chemsex», l’utilisation de crystal meth et compagnie. Chose certaine, on peut dire que la PrEP est efficace et c’est un peu le même portrait dans toutes les grandes villes où elle a été offerte. Il y a une diminution dramatique du VIH chez les hommes gais.
Même si j’en traite 2 ou 3000, comme il y a 20 ou 30,000 hommes potentiellement gais à Montréal, ce n’est certainement pas suffisant pour diminuer l’incidence des nouveaux cas, mais nous, dans notre clientèle, on a eu un réel succès surtout que le traitement est remboursé par le gouvernement moyennant une contribution minime. Quant aux arguments à l’effet que la PrEP c’est pour ceux qui ont des comportements à risque ou pour ceux qui se demandent comment savoir si une personne prend vraiment la PrEP, je vais vous donner deux réponses. Si ces gens-là n’étaient pas sous PrEP combien seraient devenus VIH? Pour la preuve d’utilisation de la PrEP, est-ce que nous avions la preuve que tout le monde utilisait le condom avant? Bien sûr que non, alors moi je pense tout simplement que si la personne veut être «safe», il existe différents moyens de se protéger du VIH. Le condom et la PrEP sont les outils nécessaires si on veut éradiquer le VIH/SIDA. Et évidemment, la PrEP protège très efficacement du VIH (95 à 99%), mais la PrEP ne protège pas contre les ITS!

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