L’intention est noble, mais…

La vie des noirs

Par: Roger-Luc Chayer (Photo: Lëa-Kim Châteauneuf)

Voilà que Montréal se joint à la longue liste des villes et pays du monde qui tiennent à souligner leur appartenance au mouvement « Black Lives Matter », et c’est dans le Village gai de la Métropole qu’il a été décidé de peindre la fresque, en français, une rareté dans le monde ! Mais voilà, le français utilisé, qui fera certainement le tour du monde, n’est pas ce qui se fait de mieux en matière terminologique…

Qu’est-ce que la terminologie au juste ? Selon le dictionnaire Larousse : « Ensemble des termes, rigoureusement définis, qui sont spécifiques d’une science, d’une technique, d’un domaine particulier de l’activité humaine. Discipline qui a pour objet l’étude théorique des dénominations des objets ou des concepts utilisés par tel ou tel domaine du savoir, le fonctionnement dans la langue des unités terminologiques, ainsi que les problèmes de traduction, de classement et de documentation qui se posent à leur sujet.« 

Malgré toute la bonne volonté du monde et le fait que le sujet principal, le respect et la reconnaissance de l’existence et des droits des personnes noires, la version montréalaise comporte quelques erreurs qui se voient maintenant des nuages. La phrase peinte sur la rue Ste-Catherine Est, entre St-Hubert et St-André est la suivante : LA VIE DES NOIR.E.S COMPTE et sous la phrase principale, #BLACKLIVESMATTER

Évidemment, le Québec étant une terre de francisation historique qui apporte beaucoup d’importance non seulement à sa langue officielle, mais aussi à la qualité de cette même langue, il n’en fallait pas plus pour lancer un sympathique débat sur l’orthographe utilisé, sur la traduction du mot « matter » et sur les alternatives qui auraient pu être utilisées si on avait consulté un peu la population, ce qui n’a pas été fait à ma connaissance.

À première vue, et après avoir consulté quelques spécialistes sur la question, il semblerait que les initiateurs du projet aient privilégié un français « populaire » sous forme d’une sorte d’énumération, plutôt que de s’en tenir à un français textuel rigoureux. Voici les exemples d’erreurs de français possibles avec la phrase telle que rédigée actuellement :

LA VIE DES NOIR (faute de pluriel)

LA VIE DES NOIRE.S COMPTE (faute de féminin pluriel)

LA VIE DES NOIRES COMPTE (faute de genre)

Quant à la question de la traduction du mot « matter » par « compte », il ne s’agit pas d’un anglicisme, mais d’une traduction qui ne représente pas la philosophie du mot « matter ». En effet, le mot « matter » qui est celui utilisé originalement dans la phrase clé du mouvement, serait mieux représenté par le terme « importe » ou « est significative« . Black Lives Matter aurait pu être La Vie des Noirs Importe ou La Vie des Noirs est Significative.

Si l’argument de l’espace requis limitait la longueur de la traduction, la version La Vie des Noirs Importe aurait été similaire.

Enfin, malgré cet exercice linguistique, il ne fait aucun doute que l’initiative de Montréal est importante au niveau local et international, et que véritablement, la vie des noirs est plus que respectable !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

quinze + 1 =