
Roger-Luc Chayer (Photo: Ian Langsdon / AFP via Getty Images)
Marine Le Pen, chef de l’opposition à l’Assemblée nationale française sous la bannière du Rassemblement national, s’en va en prison. Ou presque : elle devra rester enfermée chez elle pendant deux ans avec un bracelet de surveillance électronique, suivis d’une période de probation supplémentaire. Mais le plus grave pour elle, c’est que le jugement la rend inéligible à toute élection pendant cinq ans. Un coup de tonnerre dans la politique française, puisqu’elle était favorite pour remporter l’élection présidentielle de 2027.
Le Rassemblement national, c’est un peu la version française du Parti républicain américain sous stéroïdes — une sorte de MAGA à la française, avec un programme très similaire en matière d’immigration, de services publics et de droits LGBTQ+, y compris le mariage homosexuel. Pour nos communautés, son arrivée au pouvoir représenterait un danger existentiel, comme c’est le cas actuellement aux États-Unis, même si c’est à une échelle un peu plus modeste, pour l’instant.
Alors, pourquoi Marine Le Pen est-elle condamnée pendant que Donald Trump, lui, reste libre ?
Les faits à l’origine des condamnations des deux figures politiques sont différents, mais c’est surtout dans la manière dont leurs accusations et leurs procès ont été gérés que la différence saute aux yeux.
Selon l’AFP, la cour a condamné Mme Le Pen à une peine d’inéligibilité de cinq ans avec exécution immédiate et à une peine d’emprisonnement de quatre ans, dont deux fermes sous bracelet électronique.
Le tribunal a estimé que le préjudice total était de 2,9 millions d’euros (environ 4,5 M$ CA), les eurodéputés RN ayant fait prendre en charge par le Parlement européen des personnes qui travaillaient en réalité pour le parti
d’extrême droite.
L’indépendance des tribunaux en France est un principe sacré. Après avoir été accusée d’un crime à caractère frauduleux, Marine Le Pen a été jugée comme n’importe quel citoyen. Le tribunal, estimant que sa candidature à la prochaine élection présidentielle représentait un risque grave, a choisi de la frapper là où ça fait le plus mal : en l’interdisant de se présenter.
On peut certes débattre de la sévérité du jugement, mais on ne peut pas dire qu’il manque de cohérence. La décision est directement liée à ses activités politiques. C’est un peu comme si un pédophile était interdit d’approcher une école primaire — une mesure de bon sens, logique et proportionnée au risque. Dans le cas de Marine, c’est la même logique qui s’applique.
Pourquoi cette logique ne s’est-elle pas appliquée à Donald Trump ?
Donald Trump a été impliqué dans une kyrielle de procès civils et criminels. Contrairement à la France, où la justice suit le principe de continuité judiciaire — limitant les appels à des points très précis d’un jugement — le système américain permet une multiplication quasi illimitée des recours, même sur des détails parfois insignifiants. Trump a donc utilisé tous les moyens possibles pour faire appel de tout… et de son contraire, inondant les tribunaux de requêtes croisées, au point qu’il faudrait un actuaire pour en faire le décompte.
Les tribunaux américains ont été si longs à agir contre Donald Trump parce que le système judiciaire aux États-Unis permet de nombreux recours, reports et objections à chaque étape. Trump a utilisé ces outils pour ralentir les procédures. De plus, les juges doivent respecter strictement les droits des accusés, surtout dans des dossiers aussi sensibles. Comme Trump est une figure politique majeure, chaque décision doit être pesée pour éviter l’apparence d’un procès injuste ou partisan. Cette prudence, combinée à la complexité de ses affaires, a contribué à allonger considérablement les délais judiciaires dans son cas.
Le système de justice a accouché d’un dictateur
En l’espace de quelques mois, nous avons été confrontés à deux exemples de systèmes judiciaires aux résultats diamétralement opposés. La sévérité des tribunaux en France a empêché l’éventuelle élection d’une despote, tandis que le laxisme et l’extrême prudence aux États-Unis ont contribué à l’élection d’un dictateur qui est en train de bouleverser l’ordre mondial actuel.
L’humanité en paiera le prix, car alors qu’avec Trump, ce n’est que le début, pour Marine, c’est la fin!
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